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succédé à W. Struve comme directeur de l’observatoire de Dorpat, où il consacra ses efforts pendant vingt-cinq ans à la détermination des mouvemens propres des étoiles, jusqu’au jour où un affaiblissement de la vue le força de prendre sa retraite. Son titre de gloire, à ses yeux du moins, était sa découverte du soleil central, qui devint plus tard simplement un « groupe central. » Renonçant en effet à chercher un astre plus gros et plus massif que tous les autres, dont la puissante attraction domine l’univers visible, Mædler se contente de cette hypothèse, que les étoiles décrivent leurs orbites autour d’un point qui est leur centre de gravité commun, mais qui n’est pas occupé par une masse prépondérante. Dans ce cas, dit-il, les vitesses orbitaires doivent augmenter à mesure qu’on s’éloigne du centre commun. Le contraire aurait lieu, s’il y avait un soleil central dominant tout le ciel : les vitesses, considérables pour les étoiles voisines, iraient en diminuant à mesure qu’on s’éloignerait du foyer d’attraction. Comme il n’existe dans le ciel aucun point de ce genre autour duquel on ait remarqué des mouvemens propres très prononcés, il est évident que l’hypothèse d’un soleil central doit être abandonnée. Au contraire l’existence d’un centre de gravité pour ainsi dire immatériel, centre des mouvemens propres des astres visibles, mérite d’être discutée. Le tort de Mædler a été de croire qu’il l’avait prouvée.

Le groupe qui reste immobile au milieu du tourbillon général, Mædler le trouve dans la constellation des Pléiades, où les étoiles se pressent autour de la brillante Alcyone « comme les poussins autour de la poussinière. » Comparant les observations de Bradley aux déterminations très précises de Bessel, il montre que les mouvemens propres atteignent ici à peine 6 centièmes de seconde par an, et qu’ils sont exactement dirigés comme ils le seraient, si ce groupe était en réalité immobile dans l’espace[1]. Alcyone, qui est le centre du groupe, marquerait aussi le lieu du centre de gravité universel. Traçant autour de ce point des zones concentriques, il y constate des mouvemens propres moyens de 9, de 10, de 12 centièmes de seconde, et les directions diffèrent de plus en plus de celle qui se déduit du mouvement connu de notre soleil. Fort de ces résultats, Mædler n’hésite pas à considérer Alcyone comme le centre visible de l’univers autour duquel tournent les innombrables étoiles dont l’espace est parsemé. Ces étoiles, dit-il, sont distribuées par couches annulaires que séparent de vastes intervalles à peu près vides : c’est dans un de ces intervalles vides que flotte notre système solaire. Aux confins de l’univers, les derniers anneaux sont formés

  1. L’étude approfondie du groupe des Pléiades que M. Wolf a récemment entreprise à l’Observatoire de Paris permettra d’en déterminer le mouvement propre d’une manière plus sûre et plus complète.