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promoteurs ; il se montrait en un mot un homme d’affaires accompli.

Dira-t-on que c’est là un mérite secondaire, en ce sens qu’il dérive d’autres, qu’il accompagne successivement ou le talent de l’administrateur ou la science de l’économiste ? Ce serait une grande erreur, de nombreux exemples ont démontré que l’esprit des affaires est d’une espèce à part, sui generis, allié souvent à des contraires et étranger aussi à des aptitudes analogues. Relégué dans sa sphère propre, il détermine les phénomènes que nous avons remarqués à la louange de notre pays, il explique comment le commerce de la France, son industrie, son marché des valeurs mobilières, se montrent si prudens dans leurs combinaisons, si prompts à faire honneur à leurs engagemens, si peu aventureux dans leurs écarts ; il reste l’expression ou, pour mieux dire, le symbole de notre bon sens ; appelé à s’exercer sur un théâtre plus élevé, l’esprit des affaires est celui qui signale les bons ministres des finances. Dans l’assemblée nationale, plus d’un de ceux qu’on appelle hommes d’affaires en remplirait dignement le rôle ; en Angleterre, le parlement en compte un grand nombre parmi ses membres, Robert Peel en a ’offert le type accompli. Était-il nécessaire de citer ces noms illustres pour marquer l’intérêt d’une étude dont le sujet spécial pourrait à première vue paraître dénué d’attrait ? Outre que nul ne reste étranger aux intérêts matériels dont il s’agit, le tableau du mouvement général des esprits à notre époque ne serait certainement pas complet, si, à toutes les manifestations de la science moderne, au développement des voies de communication, à l’extension du crédit public, on n’ajoutait pas la description du lieu où se négocient les signes représentatifs de la richesse publique et privée, l’appréciation des procédés et des hommes par qui en a lieu l’échange. Hommes, procédés, organisation matérielle, tout en France et à Paris surtout semble mériter une estime particulière ; l’empressement des étrangers en témoigne, et il n’a jamais été plus grand que depuis nos malheurs. Aucun gouvernement en effet ne croit aujourd’hui pouvoir se passer de notre marché pour émettre un emprunt d’état, aucune institution étrangère ne se sent en possession de la confiance publique si ses titres n’ont pas entrée à notre Bourse. Alors que notre puissance a reçu sur d’autres points une si cruelle atteinte, jamais notre crédit matériel et moral n’a été plus apprécié, nos mœurs financières plus honorées. Pourquoi cette contradiction apparenté, et d’un côté ce résultat si favorable ? Il en existe des causes multiples, des causes générales et spéciales ; l’organisation du parquet de Paris est l’une de ces dernières.


BAILLEUX DE MARISY.