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Roland-Gosselin, Laurent, perpétuant le nom et le crédit de leur famille, il est certain qu’un très grand nombre de nouveaux agens, par leur jeunesse et leur position dans le monde, sont un peu déchus du rang de leurs devanciers.

Le but principal de cette étude n’est pas tant de montrer les habitudes financières de la France de plus en plus attachées aux valeurs mobilières, ni de prouver que la Bourse, où elles se négocient de préférence, se prête merveilleusement à la sécurité des négociations ; nous voudrions aussi relever, si cela était nécessaire, dans l’estime de tous, le caractère de ces sortes d’affaires et des hommes qui s’y livrent, agens et cliens. Il règne encore en effet dans certains esprits un préjugé qu’il nous paraît juste de combattre ; dans le monde de la politique et des lettres, les affaires et les hommes d’affaires sont encore traités avec un dédain que rien ne justifie. Certes c’est dans une pensée d’intérêt et avec l’espoir du profit que l’on se livre à ces achats et ventes de titres, dont la valeur intrinsèque n’est pas toujours facile à établir ; mais croit-on beaucoup au désintéressement des hommes politiques ? Toutes les combinaisons des partis, ce que l’on qualifierait justement de conspirations contre le présent au profit d’avenirs plus ou moins chimériques, ne sont-elles inspirées par aucun égoïsme, par aucun espoir d’en tirer personnellement avantage ? Dans ces dernières années particulièrement, le monde des affaires a donné les preuves du plus rare bon sens, on dirait presque du patriotisme le plus éclairé. Calme au milieu des excitations des partis, étranger aux passions des fanatiques et déplorant l’aveuglement de leurs chefs, il a gardé une clairvoyance qu’on ne saurait trop admirer. Il n’a pas désespéré de la fortune de la France pour l’avenir et n’a pas ménagé au présent les ressources nécessaires au travail quotidien. Les discussions ardentes de l’assemblée ne l’ont guère ému, les combinaisons politiques à plus ou moins longue échéance l’ont trouvé sceptique ; « à chaque jour suffit sa peine » était dans ce monde laborieux et sensé la devise constante, et chaque jour en effet il est revenu à la tâche de plus en plus agrandie des entreprises utiles, il a donné chaque jour l’exemple du sang-froid, de la patience et de l’effort. Les hommes politiques en peuvent-ils dire autant ?

Sans exagérer non plus les mérites intellectuels nécessaires à l’étude de toutes ces transactions et de ces entreprises multiples, on peut cependant faire remarquer que, si la Bourse est le thermomètre de la fortune publique, c’est aussi le point où convergent tous les échos de la vie sociale et économique dans le monde entier. Nous avons parlé de l’appareil télégraphique qui, au fond du cabinet d’un financier, inscrit sur des bandes de papier se