Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 11.djvu/613

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

léguées par les prédécesseurs, constituant à l’avantage de l’état et des tiers, au profit du possesseur actuel, une propriété qui comme telle peut se vendre et s’acheter.

La compagnie des agens de change de Paris n’est pas la moins vieille de toutes, puisqu’elle date de l’ordonnance de Philippe le Bel, qui désigne le Grand-Pont comme lieu où s’exercera le change ; ce n’est qu’en 1639 que la dénomination d’agens fut substituée à celle de courretiers de change : de 8 qu’ils étaient un siècle auparavant, contre 12 à Lyon et 4 à Rouen, le nombre en 1645 en est porté à Paris à 18. Sur la proposition du contrôleur-général des finances Chamillard, il est bientôt élevé à 20 à Paris et à 116 pour toute la France. Les titulaires de ces charges, qui en les exerçant ne dérogeaient point à noblesse, touchaient des gages effectifs sur le pied de 50,000 livres par an. Ils avaient été substitués par l’édit de 1705 aux anciens titulaires des mêmes offices, dont le prix vénal était déclaré trop modique en raison des bénéfices réalisés, ce qui permettait à des particuliers sans biens et sans crédit de les acquérir ; il devenait urgent, ainsi que le déclare l’ordonnance royale, de les réserver à des personnes plus distinguées, et les nobles devaient pouvoir les exercer. On rencontre déjà ici la préoccupation qui a dicté au commencement de 1875, à Bruxelles, les plaintes soulevées contre le peu de garanties offertes au public par les agens de change après l’abolition récente de la vénalité des charges. Nous ne suivrons pas depuis l’édit de 1705 dans toutes ses vicissitudes l’histoire des compagnies d’agens de change en France, mais, en nous attachant spécialement à celle de Paris, nous rappellerons seulement que le nombre de ses membres fut au bout de dix ans porté à 60, et qu’après avoir varié quelque temps de 40 à 50, il est revenu au même chiffre, maintenu jusqu’à ce jour ; c’est en 1781 seulement que le cautionnement, c’est-à-dire le dépôt dans les caisses de l’état d’une somme garantissant la bonne gestion de l’officier ministériel, fut exigé sous son appellation définitive. Il est fixé à cette date à 60,000 livres, et dès 1788 est élevé à 100,000 livres, somme évidemment supérieure aux 125,000 francs requis aujourd’hui. La loi du 17 mars 1791 supprime tous les offices, y compris ceux des perruquiers-barbiers, baigneurs, étuvistes, et fixe à 800,000 livres l’indemnité allouée aux agens de change de Paris après fermeture de la Bourse ; mais dès l’an iv le comité de salut public délivra vingt-cinq commissions pour exercer les charges d’agent de change ; en l’an ix, les cautionnemens reparurent, et le chiffre de 125,000 fr. fut établi en 1816 ; il n’a plus varié depuis, non plus que le nombre des offices.

La compagnie des agens de change de Paris, dans sa forme présente, date donc d’un siècle, et son origine remonte à deux siècles