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mune. Si les quatre murs tenaient bon, c’est que le propriétaire n’avait pas reculé devant les dépenses d’une construction de solide maçonnerie. Malheureusement, ne prévoyant pas que l’inondation viendrait un jour visiter sa demeure, il avait cru pouvoir se servir de brique simplement séchée au soleil pour les murs de refend et les cloisons intérieures. L’eau délayait peu à peu ces murailles d’argile, et au bout de quelques heures, les supports intérieurs venant à manquer, les planchers et le toit s’écroulaient en même temps. Frappée de ces vices de construction et des désastres qu’ils ont entraînés, la municipalité de Toulouse a arrêté que désormais « les fondations des nouvelles maisons seront descendues jusqu’au terrain suffisamment ferme et faites en maçonnerie avec mortier de chaux. Tous les murs, y compris les murs mitoyens, de refend ou divisoires, seront construits en matériaux solides de mortier de chaux, à l’exclusion des briques vertes et du mortier de terre, jusqu’à une hauteur de 3m,50 au-dessus du niveau du sol, et dans tous les cas de 2 mètres au-dessus du plan d’eau de la crue du 23 juin 1875. » Espérons que les municipalités des autres villes riveraines de la Garonne suivront l’exemple de Toulouse. Au reste la chaux, grâce au chemin de fer, n’est plus aujourd’hui, comme autrefois, une rareté coûteuse, et, quant à la pierre, les débordemens du fleuve ont jeté sur ses deux rives une telle quantité de galets que pendant de longues années les constructeurs pourront, s’ils veulent, renoncer à la brique.

Le comité central de secours pour les inondés s’est préoccupé, lui aussi, de l’importance de cette question, et, dans une circulaire adressée par le ministre de l’intérieur aux préfets des départemens inondés à la date du 14 août, ce comité déclare que « l’attribution des secours est soumise à la condition expresse que les bâtimens seront reconstruits en bonne maçonnerie hydraulique. » Il ajoute « qu’il ne sera fait d’exception que pour les propriétaires qui se transporteraient sur les plaines hautes et insubmersibles. » Des surveillans, choisis d’ordinaire parmi les agens-voyers et les conducteurs des ponts et chaussées, doivent veiller à l’exécution de ces prescriptions. On sait que le comité central a délégué de son côté trois commissaires chargés de surveiller la reconstruction des maisons détruites par l’inondation.

Après l’immense hécatombe d’habitations qu’a laissée derrière elle l’inondation du 23 et 24 juin, un autre fait frappe l’attention. Je veux parler de la fréquence, du retour périodique et de l’intensité croissante des crues extraordinaires de la Garonne. À cette question s’en rattache une autre : la science dispose-t-elle de moyens assez puissans non pour supprimer les crues, qui relèvent