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distinction tous les peuples. En important les dieux d’une nation dans une autre, on affaiblissait cette opinion, que chaque nation a les siens, qui ne sont faits que pour elle. Or cette croyance était chère à tous ceux qui aimaient leur pays, et qui craignaient de compromettre leur indépendance nationale s’ils perdaient leur autonomie religieuse. En la défendant avec passion, ils se conduisaient honnêtement et faisaient les affaires de leur petite ville ; mais les autres, il faut le reconnaître, ont mieux servi l’humanité. Je crois donc qu’il faut être moins sévère pour eux que ne l’a été M. Foucart. Du reste, quoi qu’on pense de cette question délicate et discutée, le travail de M. Foucart, auquel l’Europe sa vante a fait un si bon accueil, n’en reste pas moins un des meilleurs et des plus curieux qu’on ait publiés depuis longtemps chez nous sur l’histoire de la religion grecque


GASTON BOISSIER.



Exposé des applications de l’électricité, par le comte Th. Du Moncel, 3 vol. ; Paris 1874.


« Est-ce que tu enverras les foudres, et elles iront ? Et, revenant, te diront-elles : Nous voici ? » Ainsi parle le Seigneur lorsque, répondant aux plaintes de Job du milieu d’un tourbillon, il le traite de présomptueux. N’est-ce pas là pourtant ce que l’homme est parvenu à réaliser depuis qu’il s’est rendu maître de l’électricité sous toutes ses formes, et qu’il en a fait le messager docile de sa pensée et de ses volontés ? Lorsqu’on parcourt dans un ouvrage spécial et nourri de détails comme celui de M. le comte Du Moncel l’histoire de la télégraphie électrique, on ne peut se défendre d’un sentiment de surprise devant la multiplicité des moyens mécaniques qui se sont aussitôt présentés à l’esprit humain pour mettre l’agent nouveau en œuvre, une fois qu’il a été bien avéré que l’électricité pouvait servir à transmettre une dépêche à de grandes distances. Dès la fin du XVIe siècle, l’idée d’un télégraphe magnétique commence à hanter comme une chimère l’imagination de quelques hommes. Galilée dans ses Dialogues parle d’un charlatan qui a offert à un de ses amis de lui vendre un secret pour correspondre au loin par le moyen d’un aimant ; la même idée se retrouve dans divers ouvrages du XVIIe siècle : c’est toujours un aimant qui agit à distance sur une aiguille de boussole. Enfin, après une période d’incubation de deux cents ans, nous voyons éclore dans le cerveau d’Ampère l’idée pratique d’un télégraphe fondé sur les phénomènes de l’électro-magnétisme, puis Wheatstone et Steinheil combinent des appareils en état de fonctionner, et dès lors les systèmes se multiplient avec une intarissable variété. En comptant tous les télégraphes qui ont reçu une dénomination particulière, on trouve que depuis cinquante ans il en a été inventé plus de deux cents, que l’on a quelque peine à classer dans les cinq ou six catégories adoptées par M. Du Moncel :