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entremêlé de lectures tirées de la Bible, on entend proférer les attaques les plus audacieuses contre les pratiques de certaines sectes, et les doctrines, les traditions du Christ lui-même ; ainsi, dans son sermon imprimé, Christianity versus universal Brotherhood (Christianisme contre Fraternité universelle), après avoir dénié aux unitaires le droit d’établir une distinction entre la partie dogmatique et la partie morale de leur religion, l’orateur reproche au christianisme de n’avoir accepté qu’à son corps défendant les grands principes de charité et de tolérance si souvent invoqués par ses dissidens et par ses adversaires. Cette contradiction apparente s’explique toutefois par la conviction de M. Voysey qu’en matière de culte surtout on doit s’efforcer d’introduire les idées nouvelles sous les formes anciennes. a Puisqu’il nous faut une forme de culte, dit-il dans la préface de son rituel, la plus acceptable sera encore une forme déjà familière à des oreilles britanniques, et cependant dépouillée de tout ce qui est suranné ou en désaccord avec un pur théisme. »

Le sermon qu’il prononça le jour de ma visite était une réfutation de l’atonement, c’est-à-dire de l’expiation soufferte par le Christ pour le rachat de l’humanité. Ce sermon, — qui aurait pu être prononcé par tout prédicateur unitaire, — ne m’apprit rien sur les particularités doctrinales d’une église qui soutient être « unique en son genre. » Heureusement je m’étais procuré à la porte de la sacristie, pour la modique somme de 4 pence, le sermon prononcé par M. Voysey à la cérémonie d’inauguration, le 1er octobre 1871. « Notre premier objet, dit-il dans ce véritable manifeste, est de miner, d’assaillir, et, si possible, de détruire la portion des croyances religieuses que nous tenons pour fausses, » c’est-à-dire, comme il nous l’explique en détail, presque toutes les doctrines du christianisme. « Toutefois, ajoute-t-il, là ne s’arrête pas notre tâche. Nous serions à la fois tristes et confus, si notre œuvre était purement destructive. Bien au contraire, nous ne démolissons que pour rebâtir ; nous ne désirons extirper des croyances fausses que pour les remplacer par des croyances vraies. » Il exposera donc en premier lieu sa foi en l’existence d’un être supérieur, infiniment bon et juste, que, faute d’un meilleur terme, il appellera Dieu. Viendra ensuite l’affirmation d’une vie future qu’il considère comme inséparablement liée à la croyance en Dieu. « Les deux doivent rester ou tomber ensemble. » Enfin il cherchera à développer l’esprit de vérité, de moralité, de pureté et de fraternité qui lui représentent les vraies conditions du sentiment religieux. — C’est sur ces bases un peu vagues que l’église de M. Voysey a victorieusement traversé les épreuves inhérentes aux débuts de toute église nouvelle. Si, comme on peut le prévoir désormais, il réussit à trouver les fonds nécessaires pour se bâtir un temple, cette expérience sera une réponse