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dans le conseil-général de la province ; il suffirait pour l’état d’exproprier le caravansérail, que la nature même de ses constructions et sa position stratégique rendent très propre à servir de caserne.

En résumé, la société a tout fait pour assurer avec la réussite de son entreprise l’avenir de ses protégés ; elle n’a pas craint de descendre jusqu’aux détails les plus intimes ; elle a voulu surveiller leurs-dépenses, elle s’est inquiétée même de leur conduite, de leur moralité. C’est ainsi qu’il est défendu à tout colon, sous peine d’expulsion immédiate, d’ouvrir un débit de boissons sans l’autorisation expresse et par écrit du président de la société, alors même qu’il eût obtenu celle des autorités locales. Sans parler du tort que peut faire à la bourse et à la santé des habitans l’existence dans un village d’un établissement de ce genre, les cafés maures sont réputés à juste titre en Algérie comme les lieux de réunion de tous les voleurs, receleurs et autres mauvais sujets de la race indigène. Cependant il ne saurait être dans les idées ou les obligations de la société de continuer bien longtemps cette surveillance ; aujourd’hui que ses colons sont en bonne voie, elle entend les émanciper et leur laisser suivre leur propre initiative. Par sa situation, par la fertilité de son territoire, par les élémens mêmes qui le composent, le nouveau village est destiné à devenir un centre important. Le marché le plus voisin est celui des Issers, éloigné pourtant de 16 kilomètres : l’Arabe, lui, ne compte pour rien son temps, sa peine et celle de ses bêtes, et vend toujours au même prix ; mais pour l’Européen, qui raisonne différemment, la distance est fort à considérer. Tout porte donc à croire qu’Azib-Zamoun aura bientôt, comme les principaux centres de la contrée, son jour de marché, qui ne sera certes pas le moins suivi ; c’est aux habitans qu’il appartiendra alors de faire tourner cet avantage au plus grand profit de la commune et des particuliers. Déjà des dispositions sont prises pour que le village d’Azib-Zamoun soit appelé le plus tôt possible à l’existence civile ; mais ici une difficulté se présente : en fera-t-on une commune de plein exercice, une commune mixte ou une section de commune ? La commune de plein exercice est régie par un maire et un conseil municipal, absolument comme les communes de France ; les principaux centres européens sont dans ce cas. La commune mixte ou circonscription cantonale englobe une localité européenne, c’est-à-dire peuplée d’Européens, à laquelle est joint un certain nombre de douars arabes qui constitueraient proprement la commune indigène ; elle est régie par un maire que nomme le gouverneur, et qui exerce à l’égard des indigènes plusieurs des fonctions de l’ancien officier des bureaux arabes ; un conseil municipal, composé généralement de cinq Européens et de quatre indigènes, a, comme les conseils municipaux ordinaires, mission de sauvegarder les