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un lot de terres environnant. Il écrivit à ce sujet une longue lettre à M. d’Haussonville, où il exposait en style oriental ses droits et sa demande. Fallait-il donc voir cet indigène,.établi au milieu des nouveaux colons ? A sa suite allaient venir tous les Arabes des environs cherchant à vivre, eux et leurs bestiaux, aux dépens d’autrui. N’était-ce pas se ménager pour l’avenir une source de discussions, de conflits, peut-être même de dangers ? On dut pourtant en passer par là : la ferme d’Omar ne se trouve pas sur l’emplacement même du village, et ne saurait par conséquent être expropriée ; du moins le lot de terrain qu’on lui laisse ne dépasse-t-il guère la contenance d’un hectare ; ce n’est plus qu’un jardin ; il reste en outre bien entendu qu’Omar-ben-Zamoun n’aura jamais aucun droit de parcours ou de vaine pâture pour ses troupeaux, soit sur les terres des colons, soit sur les communaux.

Pendant que s’achevaient les maisons, l’administration avec une égale activité faisait exécuter ceux des travaux à sa charge qui étaient indiqués comme les plus urgens : les rues, les fontaines et l’abreuvoir ; en même temps on plantait des deux côtés, au long des chaussées, un grand nombre d’arbres à haute tige choisis parmi les essences les plus diverses, et tout autour du village, sur une épaisseur de 50 mètres, une vaste ceinturé d’eucalyptus. Ce système de forêt artificielle a été mis en pratique aux environs de Bougie et a fort bien réussi ; outre que le feuillage de l’arbre possède des propriétés fébrifuges, l’eucalyptus grandit avec une rapidité merveilleuse ; il donne un bois très dur, très solide, et convient à tous les usages ; aussi est-il appelé à rendre les plus grands services en Algérie, mais nulle part plus qu’à Azib-Zamoun, où jusqu’ici l’on pouvait faire plusieurs kilomètres sans rencontrer la moindre broussaille. On avait songé un moment à établir dans le caravansérail tout ou partie des services publics : école, église, presbytère, ce qui eût fait pour le trésor une réelle économie ; mais cet édifice avait été vendu depuis, quelques années par l’état à un particulier, et le nouveau propriétaire refusait de s’en dessaisir ; devant son obstination, on dut se résigner à élever les bâtimens nécessaires au fur et à mesure que le permettaient les ressources limitées du budget colonial : il fut décidé cependant qu’on commencerait par l’école, de peur que les enfans des nouveaux colons ne fussent exposés à demeurer trop longtemps inactifs, et à oublier dans la paresse et le vagabondage le peu qu’ils pouvaient avoir appris déjà. Il fallait aussi, pour éviter toute complication, procéder à l’allotissement des terres avant l’arrivée des immigrans. Voici la méthode qu’on a suivie : la zone la plus rapprochée du village a été divisée en lots d’une contenance moyenne de 10 hectares qui leur ont été distribués tout d’abord ; après l’installation, un second lot plus éloigné a complété pour