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avait déclaré que l’administration évaluait à six cents environ le nombre des familles déjà débarquées en Algérie, que sur ce nombre la moitié pouvait être considérée comme pourvue d’habitations construites ou en construction (trois cents restaient à pourvoir), que toutes les ressources qu’elle pouvait consacrer à la colonisation en général et les deux crédits votés par l’assemblée étant épuisés, elle avait dû prélever sur son budget ordinaire ; une somme de 687,000 francs pour continuer à venir en aide aux immigrans ; que toutefois, dans sa pensée, ce n’était là qu’une simple avance et qu’elle en attendait la restitution sur les premiers fonds votés par le comité. Celui-ci ne fut pas du même avis : l’argent qui lui avait été confié devait, selon lui, servir non pas à combler des découverts, si légitime qu’elle pût être la cause, mais à procurer aux familles qu’il avait à secourir un soulagement nouveau et effectif. En conséquence, il se contente d’allouer à l’administration 600,000 francs pour construire trois cents maisons à raison de 2,000 francs chacune, 30,000 francs pour compléter les crédits affectés aux habitations déjà en construction dans la province d’Alger, 350,000 francs enfin pour assister directement les familles aux besoins desquelles n’avait pas pourvu le crédit du 15 octobre 1872.

Le présent étant ainsi réglé, il fallait s’occuper de l’avenir ; beaucoup de familles nouvelles continuaient, sans y être appelées à se diriger vers l’Algérie, et de promptes mesures étaient indispensables, si l’on ne voulait avant peu se trouver aux prises avec les mêmes difficultés, qui avaient signalé le début de l’immigration. Évidemment il ne pouvait être question d’attribuer à chacun des arrivans la totalité de la somme nécessaire à son établissement. Si, grâce au séquestre, les terres ne manquaient pas, le comité devait tenir compte tout à la fois de ses ressources restreintes et du nombre même des familles à secourir ; par contre, son assistance ne pouvait produire un résultat vraiment utile qu’autant qu’elle fournirait à chaque colon au moins le strict nécessaire pour son installation première, en d’autres termes un logement salubre, les moyens de cultiver sa concession, des vivres jusqu’à la première récolte. Plus d’un million restait encore en caisse ; prenant alors pour base une moyenne de 3,500 francs par famille (2,000 francs pour la maison, 1,500 francs pour le matériel et les vivres), le comité fixa à 330 le nombre des installations nouvelles pour lesquelles il allouerait des crédits, ce qui, joint aux chiffres donnés précédemment, devait porter à 900 environ le nombre total des familles d’Alsace-Lorraine établies en Algérie. En attendant que les habitations fussent construites, l’administration prit soin d’arrêter provisoirement le départ des émigrans et la délivrance des passages gratuits sur les paquebots.