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quelle façon il mourut, le 7 avril 1498, veille de Pâques-fleuries, dans le lieu le plus déshonnête de son magnifique château d’Amboise.

L’histoire bien plus confuse des guerres d’Italie sous Louis XII est expliquée par M. Mignet en quelques pages lumineuses. Dans ces alternatives de succès et de défaites, à travers ces alliances continuellement abandonnées et reprises, l’historien politique excelle à dégager les traits des principaux personnages. Jules II, pour fonder la puissance territoriale du saint-siège, déploie « l’habileté tortueuse d’un politique italien et les ardeurs guerrières d’un conquérant. » Ferdinand le Catholique, prince habile et heureux, ne se considérant jamais comme lié par ses engagemens, « mettait tant d’adresse dans ses perfidies et tant d’opportunité dans ses agrandissemens qu’il trompait ceux avec lesquels il traitait sans décourager leur confiance, et qu’il acquérait toujours sans jamais rien perdre. » Les Suisses à cette époque « sont des montagnards belliqueux et cupides. » Quant à l’honnête Louis XII, on le voit ne faire jamais rien qu’à moitié, conclure une demi-alliance avec Venise, une demi-alliance avec le saint-siège, si bien qu’il finit par demeurer seul, et qu’après avoir possédé douze ans le duché de Milan, il le perd d’une façon désastreuse. Charles VIII, pour accomplir son chevaleresque voyage, avait renoncé à quelques-unes des légitimes acquisitions de ses prédécesseurs ; Louis XII, en perdant le Milanais, attira une double invasion dans ses états. Les Anglais firent une descente en Picardie, les Suisses envahirent la Bourgogne, et, ne rencontrant pas de résistance, s’avancèrent jusque sous les murs de Dijon. Délivré de ce péril à force de concessions ruineuses, Louis XII ne renonça point à l’espoir de reconquérir l’héritage des Visconti. Ce rêve le tourmentait encore quand la maladie l’emporta le 1er janvier 1515. Prince excellent sans doute, homme de grand courage, souverain paternel, mais entraîné au dehors par des ambitions trop hautes pour son caractère, « il compromit tout ce qu’il tenta et ruina même par des maladresses tout ce qui lui avait d’abord réussi. » M. Mignet ajoute qu’après seize ans de règne il était moins avancé qu’au début. Il avait cédé Naples, perdu le Milanais et laissé entamer son propre royaume. Enfin, et c’est là ce qui résulte de cette introduction aussi précise que forte, Louis XII, comme Charles VIII, léguait à François Ier, avec des souvenirs de gloire et de malheur, une tentation enivrante qui devait le conduire de Marignan à Pavie.


III

Voilà le sujet préparé, l’action va s’engager avec force. On dirait que François Ier en a le pressentiment dès les premiers jours de son