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jamais eu lieu. C’est ainsi que les nouvellistes de Berlin, peut-être pour en suggérer la pensée, ont récemment raconté que le roi de Bavière s’était rendu sur le passage de l’empereur d’Allemagne pour lui rendre ses hommages. L’entrevue n’eût point été certainement dénuée de signification à la veille des élections bavaroises, dont les préliminaires passionnaient les esprits, elle eût été promptement exploitée par les partis. Il n’y a qu’un malheur, c’était une invention des nouvellistes de Berlin ; le roi de Bavière ne s’est point déplacé pour se porter à la rencontre de l’empereur Guillaume, il est resté tranquillement chez lui, ne prenant parti ni pour les libéraux ni pour les catholiques dans les élections qui viennent de se terminer sans provoquer aucun trouble, sinon sans soulever bien des émotions. Le scrutin a définitivement prononcé en effet, et le résultat n’a pas peut-être entièrement répondu aux espérances que les catholiques entretenaient. Le fait est que les libéraux ont obtenu un certain succès. Ils ont été aidés sans nul doute par l’habileté avec laquelle le ministère avait découpé les circonscriptions électorales ; ils ont pu réussir, surtout dans les villes et particulièrement à Munich, où le premier élu est un magistrat, M. Durrschmidt, connu pour une brochure d’un esprit tout libéral sur les ordres religieux. Parmi les autres élus du parti libéral, on compte M. de Schlœr, le banquier M. de Schauss, le baron de Stauffenberg, de même que parmi les catholiques on compte le baron d’Ow, ancien président de la chambre, M. Langlois, parent de Dœllinger, M. Jœrg, des prêtres, des chanoines. En définitive, il y a 79 catholiques et 77 libéraux ; la chambre nouvelle est partagée en deux camps presque égaux.

Évidemment ce n’est point là ce que les catholiques avaient rêvé, ils avaient espéré mieux ; ils ont une majorité si faible, si précaire, qu’ils ne peuvent guère songer à s’emparer du pouvoir ; aussi ne se montrent-ils pas absolument satisfaits. Les libéraux purs, les Allemands de leur côté, ne sont pas non plus très contens malgré les avantages réels qu’ils ont obtenus ; ils comprennent que leur politique de fusion complète et absolue de la Bavière avec l’Allemagne a une limite et un frein dans l’assemblée nouvelle telle qu’elle est composée. Le ministère seul ne paraît pas trop se plaindre d’une chambre où les partis sont trop également divisés pour menacer son existence, et où il peut trouver encore après tout un point d’appui contre les pressions trop fortes de la politique de Berlin. Au milieu de ces élections, où naturellement on s’est servi de toutes les armes comme dans toutes les élections de tous les pays, une lettre de M. le prince de Hohenlohe, ambassadeur d’Allemagne à Paris, semble avoir été invoquée en témoignage et avoir exercé une certaine influence. M. le prince de Hohenlohe paraît croire que les Français ont été particulièrement préoccupés des élections bavaroises, et qu’ils céderaient à la vieille illusion de compter « trouver des alliés