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imaginables dans les rapports des animaux. Les espèces sont alliées comme appartenant au même genre, des types de genres sont unis comme représentans d’une même famille, des types de familles se rattachent à un même ordre, des types d’ordres à la même classe.

Animaux ou plantes sans lien généalogique, plus ou moins apparentés par l’organisation, habitent les parties du monde les plus éloignées. Considérant les genres, les familles, les ordres, les classes, le naturaliste les trouve dans tous les temps représentés sur le globe de la même manière, c’est-à-dire par des individus sans cesse renouvelés. Au sujet de la présence simultanée des grands types du règne animal pendant les âges de la terre les plus reculés, Agassiz, qui au temps de ses recherches de paléontologie a fourni une éclatante démonstration, insiste avec une nouvelle force : les preuves se sont multipliées ; les travaux de Murchison et de M. Barrande ont montré combien est riche la faune du monde primitif, combien sont variés les types de cette faune, combien est caractéristique la complication de l’organisme chez ces types.

Saisissante entre tous phénomènes dont la terre est le théâtre, la distribution des êtres à la surface du globe a une immense importance pour l’histoire naturelle aussi bien que pour la géographie physique. Depuis le siècle dernier, on s’en occupe ; depuis quelques années, on commence à en traiter avec la rigueur scientifique. L’ancien professeur de Neuchatel, toujours séduit par les aperçus que suggère la comparaison des faunes, accorde un légitime intérêt à la connaissance parfaite de l’aire d’habitation des différens animaux ; il note les espèces confinées dans d’étroites limites et les espèces répandues sur de vastes espaces, songeant à la possibilité de découvrir à de tels indices les conditions primitives des espèces. Rappelant que l’étude de la distribution géographique des plantes et des animaux a porté exclusivement sur les êtres de l’époque actuelle, il indique une voie qui ne peut manquer de conduire les investigateurs à déchiffrer de nouvelles pages de l’histoire du monde. La distribution des plantes et des animaux, dit Agassiz, a ses racines dans le passé. On ne comprendra bien l’état actuel qu’en le rattachant aux époques géologiques antérieures. Pour saisir entièrement la liaison des êtres avec le sol qu’ils habitent, il est indispensable de reconnaître les changemens survenus dans la configuration des terres et des mers. On ne s’expliquera les ressemblances des animaux qui vivent dans l’océan, sur les rivages opposés d’un continent, que si l’on est assuré des communications directes ayant existé entre des mers aujourd’hui séparées. On ne pourra suivre les affinités d’animaux disséminés sur les versans opposés des hautes chaînes de montagnes qu’en se reportant aux