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de Jésus perpétuée à travers les siècles, c’est une entreprise bien autrement périlleuse. Il faut remercier du moins M. D. Dumoulin d’avoir confié la meilleure partie de cette tâche aux grands artistes qui, pendant dix-huit siècles, dans le libre essor de leur inspiration, ont exposé, expliqué, glorifié, chacun à sa manière, et la vie et la mort, et la résurrection du Dieu crucifié.


SAINT-RENE TAILLANDIER.


L’Inde des Rajahs, par M. Louis Rousselet, 1 vol. in-4o ; Hachette.


M. Rousselet a parcouru l’Inde de 1863 à 1868. Il a rapporté de son voyage des notes et des vues photographiques à l’aide desquelles a été composé ce livre, remarquable à tous égards, que vient de publier la maison Hachette. Il est juste de citer le nom de l’éditeur à côté de celui de l’auteur, car l’Inde des Rajahs est véritablement une œuvre d’art. Si le texte ne laisse rien à désirer, les gravures, en grand nombre, l’éclairent, l’illustrent et le complètent. Nous ne croyons pas qu’il ait jamais été écrit sur l’Inde de livré plus attrayant et plus sérieux.

L’Inde, telle que la comprennent les voyageurs qui font le tour du monde en quatre-vingts jours, se compose de Bombay, de Madras et de Calcutta, chefs-lieux des trois présidences anglaises. Ces grandes cités, que nous avons visitées pour notre part dans une excursion rapide, ne sont que les vestibules de l’Inde. Si elles ont conservé, Bombay surtout, le type indigène, ce type est bien altéré par le mélange de l’élément britannique. Pour se faire une idée exacte du pays, de ses incomparables beautés, de son ancienne splendeur, de ses monumens, il faut suivre M. Rousselet dans ce voyage, pendant lequel il a visité les régions de l’intérieur, l’Inde vierge, l’Inde des rajahs. L’exact voyageur calcule que, du sud au nord et de l’est à l’ouest, il a parcouru près de 12,000 kilomètres, en chemin de fer, en voiture, à dos de chameau ou à dos d’éléphant. Cette exploration lui a pris six années, bien employées au profit de l’art, de l’histoire et de la politique contemporaine.

A côté de la domination britannique, il y a encore dans l’Inde des souverains qui gouvernent des millions de sujets et qui conservent dans leurs cours les traditions de l’ancien temps. M. Rousselet. a recueilli le bénéfice de leur hospitalité fastueuse. Si le patronage des autorités anglaises l’aidait à franchir le seuil des palais, son titre de Français achevait de lui rendre favorable l’accueil des rajahs. Le nom de la France a laissé dans l’Inde des souvenirs et un prestige qui ne sont point effacés. Le voyageur a donc obtenu toutes les facilités désirables pour explorer cette vaste étendue de pays, qui garde de l’antique civilisation de si fortes empreintes. A chaque pas, il a rencontré les vestiges d’empires puissans, non-seulement des temples, des palais, des tombeaux, dont l’architecture à la fois grandiose et fine commande l’admiration, mais