Dans un de ces jours où la reconnaissance égare le jugement et pousse aux extrêmes, on détruisit la plus complète réunion d’objets où l’on pût étudier la fécondité et la grâce du génie antique, et le legs de M. Lacaze fit reléguer dans l’ombre des corridors, où elles sont oubliées, les admirables terres cuites antiques, grecques et romaines, seule partie d’une beauté incontestée qui pouvaient fournir un prétexte et une excuse à l’achat si dispendieux de la galerie Campana. On eût compris peut-être ce revirement d’enthousiasme, si les œuvres qui le faisaient naître eussent apporté un intérêt nouveau et des élémens plus utiles aux recherches de l’esthétique et de l’histoire. Loin de nous la pensée de diminuer l’importance d’une collection charmante qui n’avait contre elle que sa trop grande étendue et les rancunes qu’elle allait provoquer innocemment ; mais, sans manquer aujourd’hui aux conditions d’un contrat, accepté, et tout en laissant sous les yeux des visiteurs la preuve, bonne à mettre en évidence, qu’en France, aussi bien qu’en Angleterre, il y a des citoyens capables de générosité, ne pourrait-on pas distribuer dans les jolies salles de l’attique ces exemples un peu trop abondans de la fécondité de notre école au XVIIIe siècle, là où l’on n’avait pas hésité à placer dernièrement les belles toiles de l’école hollandaise ? La lumière y est favorable, et la proportion des murs et des plafonds n’y écraserait pas la petitesse des œuvres. Les copistes de profession y trouveraient un petit royaume que le public ne leur disputerait pas, et sans oublier aucune convenance, sans gêner aucune admiration, on rendrait alors au grand art un sanctuaire dont plus d’une fois ceux-là même qui l’avaient si bien orné ont dû regretter d’avoir trop précipitamment dispersé les richesses. Enfin ne vaudrait-il pas mieux prévenir certaines critiques que de paraître plus tard obligé de s’y soumettre ?
Si ces observations ont leur justesse, un jour ou l’autre elles seront écoutées ; elles peuvent attendre, elles ont pour auxiliaire le temps. Avec un pareil aide, on peut réparer bien des erreurs, et le retard du moins n’est pas ici un danger ; mais il y a des maux plus sérieux auxquels il importerait peut-être de porter un plus prompt remède. Que de fois n’a-t-on pas entendu reprocher à l’administration des musées son indifférence sereine et son inertie traditionnelle, lorsque dans des ventes célèbres on voyait acquérir par l’étranger des œuvres dont elle ne leur disputait même pas la possession, et qui avaient leur place marquée au Louvre ! Comment se serait-elle défendue publiquement lorsque, pour le tenter, il lui eût fallu accuser ceux-là même dont elle dépend ? L’administration des musées est pauvre, honteusement pauvre, la faute n’en est pas à elle. Avec un budget sensé, elle retrouverait, sans qu’on l’y excitât autrement, des espérances, et une énergie presque inutiles aujourd’hui. Chacun