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nouvelle série de gigantesques édifices, de banques de toute nature et de toute nationalité, des bureaux de change, de chemins de fer, de bateaux à vapeur, d’entreprises de tout genre, de messagerie, de commission, de dépôts. N’oublions pas les safe-deposits, où, moyennant une redevance mensuelle légère, variable suivant les cas, des compagnies autorisées, incorporées, vous louent un coffre, une sorte de tiroir d’acier numéroté, noyé dans un mur de granit souterrain. Vous y déposez, vous y cachez vous-même les valeurs, les objets précieux que vous voulez assurer contre toute chance de perte, de vol, d’incendie : titres de bourse, argenterie, bijoux, diamans, papiers d’affaire ou de famille. La compagnie vous donne votre clé, une merveille de serrurerie impossible à reproduire sans le modèle, et vous venez, quand il vous plaît, inspecter votre cassette. Vous l’emportez pour cela dans un box ou bureau fermé, où nul ne vous voit, vous détachez seul vos coupons, prenez vos notes. On ne vous donne aucun reçu de vos dépôts, on n’en répond point, mais une garde attentive veille nuit et jour autour et au dedans du monument, nul voleur n’a encore tenté d’envahir cette forteresse, et toutes les précautions sont prises contre l’incendie, si jamais il s’attaquait à ces caves de granit et d’acier. On dit que l’idée de ces compagnies de dépôt de sûreté vient d’Angleterre ; elles n’existaient pas en effet à New-York il y a quelques années. Aujourd’hui on les rencontre dans Broadway au nombre d’une douzaine, et toutes distribuent de gros dividendes à leurs actionnaires. Les banquiers de Paris, quand on leur parle de ces choses, répondent que les mœurs, les idées françaises y sont rétives ; ils devraient cependant en faire l’essai.

Un peu plus loin que l’église de la Trinité est un vaste édifice tout en granit, presque achevé, et dont le style, où la puissance s’unit à la sobriété, fait honneur à l’école architecturale américaine. C’est là que la poste et la douane s’installeront définitivement demain. Une des immenses façades donne sur un square, planté d’arbres, où est aussi l’hôtel de ville ou City-Hall, qu’elle écrase. Au voisinage de ce square, qui a vu se dérouler les diverses péripéties de plus d’un soulèvement populaire, se profilent les magnifiques bureaux des plus grands journaux de New-York. La façade somptueuse de quelques-uns de ces édifices privés fait pâlir celle des édifices publics. C’est là que sont le Herald, le Times, la Tribune, le Staats-Zetiung, ce dernier allemand. Certaines de ces feuilles se tirent à plus de cent mille exemplaires chaque jour, et contiennent quelquefois seize pages de texte et d’annonces en caractère très serré. Le prix en est modique, 3 ou 4 cents par exemplaire, — le cent est égal à l’un de nos sous. Le Times de Londres est dépassé par le Times et le Herald de New-York, La machine automatique