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majorité s’entendit à grand’peine pour faire le septennat. Aux efforts que ses chefs du centre droit et de la droite durent faire pour réunir dans cette œuvre laborieuse tous les partis qui avaient concouru à la chute de M. Thiers, aux défiances à peine dissimulées qui avaient accueilli une institution qui, si provisoire qu’on voulût la faire, pouvait ajourner à sept ans les impatientes espérances des uns et les intraitables prétentions des autres, les chefs du centre droit auraient pu voir qu’il fallait, pour asseoir le septennat sur une base solide, se résigner au déplacement de l’axe de la majorité en gagnant à gauche ce que tôt ou tard ils devaient inévitablement perdre à droite. S’ils se fussent décidés dès ce jour à faire les modestes concessions que leur demandait, par l’organe de son rapporteur, la majorité de la commission chargée d’examiner le projet de loi sut la prorogation des pouvoirs du maréchal de Mac-Mahon, ils eussent assuré au vote de cette loi 500 voix de majorité, quels que fussent les regrets causés par la chute de l’homme à la politique duquel le centre gauche et la gauche étaient restés et resteront fidèles. Au lieu de cela, le ministère de M. de Broglie mit toute son habileté à rallier au septennat toutes les fractions de l’ancienne majorité, y compris l’appoint bonapartiste. Ce fut, après la triste campagne de la coalition, une première faute qu’il devait bientôt expier.

Cette institution, à vrai dire, n’était de nature à satisfaire aucune des fractions du parti républicain. L’assemblée actuelle, qui pouvait faire une constitution, en sa qualité plus ou moins contestable de constituante, devait, en bonne logique constitutionnelle, laisser à une autre assemblée la tâche d’appliquer cette constitution et de nommer le chef du pouvoir exécutif. Le centre gauche, plus particulièrement préoccupé des nécessités de la situation, admettait pourtant cette dérogation aux principes qu’il n’avait point prévue dans son programme ; mais il entendait lier indissolublement la prorogation des pouvoirs du président à la discussion et au vote des lois constitutionnelles. Voilà pourquoi, à son grand regret, il ne put voter la loi du 20 novembre qui séparait deux questions inséparables dans l’œuvre totale de la constitution. Et cependant tel était le sentiment de conciliation qui animait la plupart des républicains de l’assemblée que, cette loi une fois votée, non-seulement ils s’y résignèrent, mais qu’ils la défendirent contre les violentes attaques des intransigeans de la droite et les manœuvres du parti bonapartiste. Cette conduite, nous le reconnaissons, n’était pas moins habile que loyale, car, quoi qu’on fasse, à moins d’en supprimer le titre, le septennat, c’est encore la république.

Ici, qu’on nous permette d’ouvrir une parenthèse sur la nécessité d’en finir avec toute politique d’équivoque. Le mal dont souffre le pays, dont mourra l’assemblée dans le discrédit et l’impuissance,