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Des scènes de la vie privée, ou, à vrai dire, de la vie très intime, sont rendues et traitées avec une grâce indicible. Le groupe si bien composé du jeune patricien et de sa maîtresse a la pureté des lignes et l’harmonie des couleurs. Dans le venereum de la maison du faune, à Pompéi, il y a une peinture du même genre et non moins remarquable. C’est une homme qui tient une jeune femme entre ses bras. Elle se défend, elle est pudique. Ce n’est point la volupté, c’est l’amour. Un autre peintre a représenté la fin d’un repas. Un jeune homme à demi couché sur le biclinium vide un rhyton d’un trait, tandis qu’à ses pieds une femme fait un signe à quelque esclave. Comment ne pas admirer aussi cette adorable figure de femme, qui, assise et ses vêtemens tombés jusque sur ses genoux, arrange ses cheveux en se regardant dans un miroir d’acier poli ? Elle n’a point l’expression de coquetterie d’une femme moderne. Elle est simple comme une nymphe qui se mire dans une source.

La caricature et cette peinture que les anciens appelaient la ropographie et la rhyparographie ont leurs spécimens dans les fresques de Pompéi et d’Herculanum. Voici Énée, Anchise et le petit Ascagne, coiffés de têtes de chiens, fuyant Troie mise à sac. Voici un scarabée conduisant un char attelé d’un gros perroquet ; on a voulu voir dans cette fresque la satire allégorique de l’empereur .Néron. Voici des pygmées luttant contre des sauterelles, des nains se livrant à des danses grotesques. La représentation des métiers est plus intéressante au point de vue de l’étude de la vie antique, sinon au point de vue de l’art, car toutes ces peintures, d’une spirituelle composition d’ailleurs, sont d’une exécution extrêmement lâchée ; elles n’ont ni dessin ni perspective. La plupart sont à peine esquissées. Il y a des fripiers qui déplient, lustrent et montrent des étoffes, des cordonniers qui essaient à leurs cliens sandales, crépides et brodequins, des foulons qui trempent, foulent et étendent des tissus. Ici on entre chez un quincaillier ; on voit les vases de cuivre, on devine les ciseaux, les pinces et les figules. Plus loin, on visite une boulangerie ; on aperçoit dans un four dix rangées de ces pains en forme de barrette dont les pareils sont exposés à l’étage supérieur du musée. On pénètre dans l’école ; les élèves, rangés en demi-cercle, écrivent sur leur ardoise, tandis que le pédagogue fouette un écolier indocile. Une jeune femme, assise dans un jardin devant un châssis fixé à un pilastre, palette et pinceaux en main et une boîte à couleurs à ses pieds, copie un hermès à tête de Bacchus. Un jeune homme dessine une statue du Forum. Souvent, au lieu de peindre les artisans mêmes, les peintres de Pompéi ont personnifié les génies des métiers sous la figure de petits amours ailés. Il y a les génies des vignerons qui foulent le raisin, les génies