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C’est donc à Lyon et à Bordeaux que la commission de l’assemblée propose de fonder les nouvelles facultés mixtes de médecine et de pharmacie. Au reste, les offres faites par les quatre autres villes sont tellement vagues ou insuffisantes qu’il est facile de voir qu’en dehors de Bordeaux et de Lyon la question n’a vraiment pas été sérieusement étudiée. Néanmoins la commission a pensé qu’il y avait lieu de donner au moins en partie satisfaction aux vœux des villes dont les demandes sont ainsi écartées : elle recommande d’accorder à Lille et à Nantes « le plein exercice, » c’est-à-dire que ces deux écoles préparatoires garderaient leurs élèves pendant quatre ans et leur feraient subir les trois premiers examens de fin d’année ; les aspirans au grade de pharmacien de première classe y jouiraient d’avantages analogues. En accordant aux écoles de Nantes et de Lille la faculté de retenir auprès d’elles leurs étudians une année de plus, on favoriserait assurément dans ces régions si délaissées la production du docteur en médecine, s’il est permis d’ainsi parler ; les familles se sentiraient plus disposées à encourager la vocation médicale chez leurs enfans, auxquels un séjour prolongé à Paris ne serait plus imposé pour l’achèvement de leurs études. Pour Toulouse et Marseille, l’institution des écoles de plein exercice a paru moins urgente, ces régions pouvant être suffisamment desservies par les facultés de Montpellier, de Lyon et de Bordeaux.

Dans cette enquête sur l’opportunité de la création de nouvelles facultés, on n’a pu éviter de signaler en passant les défauts plus ou moins graves de l’organisation actuelle de l’enseignement médical dans les facultés déjà existantes. Quelques voix se sont élevées pour réclamer des réformes qui, inaugurées par les nouveaux établissemens, ne manqueraient pas d’être imitées tôt ou tard par les anciens, La majorité de la commission n’a pas cru toutefois qu’il était sage d’imposer ainsi par une voie détournée à nos facultés des modifications qui en troubleraient le fonctionnement, et qui entraîneraient des changemens dans les conditions légales de l’exercice de la médecine et de la pharmacie. On s’est contenté d’adopter et de patronner chaudement l’heureuse innovation qui a été inaugurée à Nancy par la création d’une faculté mixte de médecine et de pharmacie. Il y a tout avantage à réunir sur les mêmes bancs les futurs médecins et les futurs pharmaciens : une certaine part d’instruction doit leur être commune, et leurs études spéciales même gagnent à cette fréquentation continuelle, sans compter que cette organisation mixte diminue notablement les frais généraux. La création des nouvelles écoles dans ces conditions sagement élargies exercera une heureuse influence non-seulement sur le développement du corps des médecins, mais sur le niveau intellectuel du pays en général, car il n’est pas d’éducation plus saine et plus virile que l’éducation médicale.


Le directeur-gérant, C. BULOZ.