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exemple, un sceau du prieur de l’abbaye de Saint-Sever au diocèse de Coutances, de l’an 1282, nous représente ce dignitaire ecclésiastique tenant le balai, emblème d’une de ses attributions, le nettoyage de l’église. Sur un sceau de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés (année 1253), on voit le chambrier ayant à la main la paire de ciseaux, qui rappelle qu’il était chargé d’habiller les moines. Un joli sceau de 1269 représente le trésorier de l’église de Nevers, debout, un trousseau de clés à la main, et s’apprêtant à ouvrir l’armoire aux reliques de son église. Pour en revenir à ce que j’ai dit du commerce du poisson, je rappellerai le sujet que présente, en 1467, le sceau de la corporation des poissonniers de la ville de Bruges. On trouve là, dans toute sa simplicité, l’existence du modeste marchand ; il est figuré portant, suspendu à une courroie qui lui passe sur les épaules, son éventaire qui est à pieds et peut ainsi, quand il s’arrête, lui servir d’état. Un large poisson déposé dessus montre quel est son commerce. Je ne veux point en finir avec ces scènes de la vie de tous les jours sans signaler un autre sceau qui nous rappelle un de ces faits malheureusement aussi journaliers alors. Un chevalier moleste un vilain ; on voit le noble à cheval saisir par les cheveux le pauvre diable qui n’en peut mais. Le fait curieux, c’est que cette scène constitue des armes parlantes. Le sceau, qui est de 1257, porte pour légende : Ce est le scel Jehan Poilevilan, et nous apprenons ainsi qu’il appartenait à un chevalier qui devait aux habitudes auxquelles le sujet fait allusion le surnom qui lui avait été donné. Jehan dit Poilevilain avait appendu ce sceau à l’une de ses quittances.

Les outils, les ustensiles fréquemment figurés sur les sceaux, sur ceux des corporations marchandes, nous reportent également aux occupations ordinaires de la vie et sont intéressans à étudier pour l’histoire de l’industrie. On les rapprochera de ceux qu’on voit gravés sur les pièces en plomb servant de jetons ou de médailles au moyen âge, des méreaux sur lesquels de pareils emblèmes s’observent fréquemment, associés plus d’une fois à l’image du saint patron de la corporation. On a retiré du lit de la Seine un grand nombre de ces plombs, dont un zélé antiquaire, M. Forgeais, a publié une intéressante description. Ces représentations d’outils et d’ustensiles, qui apportent, comme celles de meubles, par exemple de chaises ou chaières à dossier et coussin, de tables, de bahuts, des élémens utiles pour l’histoire de l’ameublement et des métiers au moyen âge, peuvent n’être pas toujours des représentations rigoureusement exactes des formes alors en usage. Elles ne nous offrent parfois que des formes surannées conservées par la tradition. C’est là, il faut le dire, le danger des représentations sigillographiques. Plus d’une est empreinte d’archaïsme et peut égarer sur les dates. Toutefois l’influence des types anciens a été, on le constate, moins