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ou non, mais suivis, rendraient de plus en plus visibles ces désirs de paix encore contenus.

La Catalogne est après les provinces basques le principal foyer de l’insurrection ; les hostilités s’y poursuivent sans interruption depuis 1872, et le traité d’Amorevieta fut ici comme nul et non avenu. Elle se compose de quatre provinces de la division nouvelle, qui en admet quarante-neuf en comptant les Baléares et les Canaries, et ces provinces sont les plus peuplées, les plus industrieuses de l’Espagne. Les grandes villes y sont nombreuses, gagnées aux idées libérales, même démagogiques et socialistes, là où se trouvent des manufactures. Aussi les carlistes n’y dominent-ils pas exclusivement comme dans les provinces. La partie montueuse du pays est la moins peuplée, compte moins de villes, obéit davantage à l’influence du clergé : c’est celle qui a fourni le plus grand nombre de rebelles. Les Catalans sont fiers, énergiques, travailleurs, entendus aux affaires, âpres au gain, indépendans, toujours prêts à se soulever contre Madrid dans un sens ou dans l’autre, et toujours retirant quelque profit plus ou moins direct de ces soulèvemens. Pour protéger leur industrie, ils imposent aux autres provinces des tarifs de douane excessifs, et, par la contrebande pratiquée en grand, inondent le pays de produits anglais, qu’ils donnent pour leurs. Aussi sont-ils peu aimés du reste de l’Espagne, aussi bien que les Basques, qui abusent de leurs privilèges pour se révolter, et peut-être ce sentiment entre-t-il pour beaucoup dans l’énergie avec laquelle on repousse leur prétendant. La guerre d’ailleurs dans ce pays n’a plus le même caractère qu’en Viscaye : grâce aux opinions de leurs habitans, toutes les villes de quelque importance sont au pouvoir des libéraux ; les carlistes tiennent la campagne ; depuis le mois de février 1873, ils ont pris l’offensive, attaquant tantôt une ville, tantôt une autre ; les troupes régulières de leur côté sont toujours en mouvement pour secourir ou ravitailler les places et rétablir la circulation sur les lignes de chemin de fer coupées par l’ennemi. Dans le royaume de Valence (provinces actuelles de Valence, Alicante et Castellon), dans une partie de l’Aragon (province de Teruel), la guerre se fait à peu près de même façon, et lorsque le gouvernement aura soumis les Basques, la pacification de la Catalogne et des autres provinces insurgées sera beaucoup plus facile, car il s’y trouve dès maintenant sur le pied de l’égalité au moins avec don Carlos.

Une partie de la presse en France et à l’étranger s’est plu à exalter l’importance et le mérite des généraux carlistes. Cependant, à prendre les plus connus, on ne voit pas qu’aucun d’eux ait ce coup d’œil, ce génie militaire qui entraîne le succès et force la victoire. Le maréchal Concha, tué en héros, leur était de tout point supérieur ;