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[1]. Ce sont aussi, avec des poissons de la famille des cyprins, des insectes aquatiques tels que des dytiques et des hydrophiles. Les espèces qui fréquentent le voisinage des eaux sont en grand nombre ; il y a en quantité des charançons, des tipules, et beaucoup d’autres diptères, puis quelques abeilles solitaires et des libellules. L’ensemble, remarque M. Oustalet, présente une association de types indigènes et de types maintenant étrangers à l’Europe ; c’est dans le bassin de la Méditerranée que se trouvent de nos jours plusieurs des types représentés dans l’ancienne faune du Puy de Corent. La présence de végétaux tels que des figuiers, des eucalyptes, des smilax[2] mêlés à des séquoias et à des pins, annonce que la région de l’Auvergne, où les marnes calcaires se sont déposées, jouissait d’une agréable température. Dans les flores et les faunes anciennes, il est ordinaire de rencontrer à côté des formes européennes des formes qui, à l’heure présente, existent seulement dans de lointaines parties du monde. M. Alphonse Milne Edwards a montré qu’à l’époque tertiaire vivaient sur notre sol, en même temps que des oiseaux palmipèdes, des échassiers, des rapaces plus ou moins voisins de nos espèces actuelles, un solitaire peu différent de celui de l’Afrique australe, des couroucous, même des perroquets[3]. Pour les mammifères, des associations analogues sont partout signalées.

Les gypses d’Aix en Provence, plus anciens que les schistes d’OEningen et que les marnes calcaires de l’Auvergne, nous ont conservé les empreintes d’une infinité de plantes et d’un grand nombre d’insectes[4]. M. de Saporta, qui a fait du terrain et de sa végétation une étude profonde, a décrit avec bonheur l’aspect que devait offrir la contrée à une époque reculée de la période tertiaire. « Sur l’emplacement occupé par la ville d’Aix existait un lac limpide aux bords escarpés sur quelques points, dit le savant paléontologiste, dominé d’un côté par une sorte de promontoire, bordé au sud par une plage sinueuse dessinant une baie où des eaux thermales mêlaient leurs eaux à celles du lac ; plus loin, une plaine s’élevait d’une manière insensible, pour disparaître sous une vaste forêt tantôt impénétrable, fleurie et touffue, tantôt presque entièrement dépouillée. La végétation elle-même, poursuit le botaniste, aurait ménagé bien des surprises et découvert à son visiteur une foule de contrastes. Il aurait aperçu des pins, des thuias, des sabines mêlées à des palmiers grêles, çà et là des dragonniers courts et massifs, variés de ton, d’aspect et de port. Il aurait remarqué la rareté

  1. Insectes névroptères dont les larves aquatiques se construisent des fourreaux avec de petites pierres, des coquilles ou des fragmens de végétaux.
  2. Végétaux dont les espèces vivantes sont américaines ou asiatiques.
  3. Recherches zoologiques et paléontologiques sur les oiseaux fossiles.
  4. Ils appartiennent à la fin de l’époque éocène.