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néanmoins bien distinctes, capables de produire des hybrides jouissant d’une fertilité égale à celle des types primitifs. Défendue avec force par un naturaliste, M. Regel, cette opinion reste cependant douteuse ; ainsi que le fait remarquer M. Naudin, l’expérience même laisserait peut-être la question indécise. L’origine hybride de divers saules et de plusieurs rosiers deviendrait extrêmement probable, si ces végétaux ne se reproduisent pas fidèlement par la voie des semis et s’ils changent de physionomie d’une génération à l’autre ; dans le cas au contraire où ces formes se conserveraient intactes, les botanistes se trouveraient disposés à les considérer comme autant de types particuliers. Une conclusion se dégage fatalement des résultats des nombreuses expériences entreprises dans le dessein de reconnaître les résultats du mélange de deux espèces végétales, c’est qu’il est impossible de maintenir les formes hybrides. Si par une très rare exception des formes hybrides persistent quand elles proviennent d’espèces extrêmement voisines, chose encore fort incertaine, la fixité absolue de presque tous les types n’en demeure pas moins le grand fait qui s’impose avec le caractère de l’évidence.


III.

De tous les phénomènes qui tombent sous l’observation des hommes, l’évolution des êtres est l’un des plus merveilleux. Une cellule apparaît, un œuf se constitue, un embryon se développe, et par une suite de changemens identiques chez tous les individus, dans un temps contenu dans des limites plus ou moins circonscrites, un animal vient reproduire les traits de ses parens. C’est l’évolution comme l’entendent les naturalistes. Le cycle s’accomplit d’une façon si régulière que tout est prévu depuis les découvertes de Charles-Ernest de Baer et d’une foule d’investigateurs, qui ont déterminé pour les divers types d’animaux les conditions du développement. M. Darwin et les adeptes de sa doctrine supposent que l’évolution n’est pas arrêtée chez les êtres parvenus à la forme définitive. À cet égard, ont-ils donc apporté une preuve ou seulement entrevu une probabilité, surpris un indice ? Nullement. Les partisans des transformations indéfinies, selon la juste remarque d’Agassiz, « n’ont rien ajouté à notre connaissance de l’origine de l’homme et des animaux. » Ils citent des faits connus de tout naturaliste instruit et se jettent dans des interprétations de pure fantaisie. « Nulle découverte, nul fait nouveau ou encore inaperçu, » constate avec une entière vérité l’illustre professeur de Cambridge.

M. Darwin et les défenseurs de ses idées insistent sur l’étonnante ressemblance des êtres durant les premières phases du développement. Si aucun doute ne subsiste à ce sujet, ce n’est certes