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à celles de la primevère commune, d’autres à peine différentes de celles de la primevère à grandes fleurs ; le retour aux types primitifs devient évident. Dans les jardins d’agrément, les deux plantes sont cultivées ensemble, elles se croisent avec facilité ; les hybrides étant fécondées par le pollen des fleurs de race pure, les variétés se multiplient de la sorte et se renouvellent sans cesse. Différentes espèces du genre Datura sont fécondées l’une par l’autre ; souvent les hybrides prennent des proportions magnifiques, mais en général les dernières fleurs seules persistent, beaucoup de graines se constituent d’une manière imparfaite ; à la seconde génération, plus encore à la troisième, l’un des élémens s’efface ; c’est tantôt la paternité originelle, tantôt la maternité qui domine. Une nicotiane reçoit le pollen d’une autre espèce du même genre[1]. La plante hybride, remarquable par le mélange des caractères, prend un beau développement, néanmoins elle est stérile, son pollen ne consiste qu’en poussière blanche impropre à la fécondation.

M. Ch. Naudin poursuit ses expériences sur les nombreuses espèces de nicotianes : les plus dissemblables donnent naissance à des hybrides stériles ; les plus voisines ont des produits fertiles, et toujours à la seconde et à la troisième génération le végétal revient à l’un ou à l’autre des deux types primitifs. Ce dernier phénomène fut également observé à l’égard des pétunias. Un hybride, issu de deux espèces de digitales[2], se montre absolument stérile ; des produits de la linaire commune, fécondée par la linaire pourpre, fournissent cinq générations[3] ; on observe une grande diversité parmi les plantes de même origine, c’est tantôt un état à peu près exactement intermédiaire entre les deux types, tantôt une grande ressemblance soit avec l’un, soit avec l’autre ; plus on s’éloigne du point de départ, plus les formes primitives reparaissent dégagées de tout mélange appréciable. L’hybride de deux groseilliers est stérile[4] ; répandu dans quelques jardins, les botanistes savent qu’il ne fructifie jamais. Les plantes de la famille des courges ayant des fleurs unisexuées se prêtent admirablement aux expériences de fécondation, M. Naudin a beaucoup profité de cette condition favorable. Une espèce est imprégnée du pollen d’une autre espèce bien distincte[5]. Chez les produits, la dégénérescence des organes reproducteurs est très prononcée, les fruits viennent en petit nombre ; ils n’acquièrent pas le volume ordinaire et ne contiennent que peu de graines ; à la seconde génération, le végétal s’appauvrit encore ; un hybride de la

  1. Le genre Nicotiane, de la famille des solanées, a pour type le tabac.
  2. Les Digitalis lutea et D. purpurea.
  3. La Linaria vulgaris, fécondée par la linaria purpurea.
  4. Les Ribes palmatum et R. sanguineum.
  5. Le Luffa cylindrica, fécondé par le Luffa acutangula.