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y est bien pire encore ; on y cherche à rendre les enfans étrangers à leurs familles, à éteindre chez eux les sentimens les plus doux, à faire des égoïstes, afin de pouvoir plus facilement faire des soldats de l’église, obéissant aveuglément à leurs évêques. On y réprime tout acte d’indépendance. La patrie ? on n’en parle que pour en inspirer la haine. En vérité, entre les prêtres sortis clés séminaires et les laïques sortant des universités, où l’on respire un air plus sain, où se donnent des enseignemens bien différens, la concorde et la paix sont impossibles.

Il est un autre point sur lequel ont porté plus d’une fois en Italie les discussions des deux chambres : c’est celui qui concerne la liberté de l’enseignement. Ce n’est pas ici le lieu de traiter ce sujet avec toute l’étendue qu’il comporte ; je me bornerai à constater que ce sont les administrations communales et provinciales qui seules fondent, administrent et soutiennent les établissemens d’instruction primaire et les écoles techniques. À côté des gymnases et des lycées qui dépendent du ministère de l’instruction publique, il y a d’autres établissemens d’instruction secondaire fondés par les particuliers ou les administrations locales. Quant aux universités, aux instituts professionnels, aux grandes écoles spéciales, l’état s’y réserve la collation des grades, et il considère qu’il y aurait les plus graves inconvéniens, dans l’état des choses, à donner aux particuliers, aux corporations, aux administrations provinciales elles-mêmes, le droit de créer des établissemens d’enseignement supérieur. Il pourvoit du reste largement à leur entretien : sur les 23,710,144 livres qui figurent dans le budget de 1873 pour la part contributive de l’état aux dépenses de l’instruction publique, plus de la moitié est consacrée aux universités, aux collections scientifiques, aux musées[1].

Dans cette réorganisation de l’instruction populaire et de l’enseignement secondaire et supérieur, l’Italie, comme le prouvent les longues et solennelles discussions que je viens de résumer, a déployé sans doute beaucoup d’ardeur et d’intelligence ; mais la tâche qu’elle poursuit est loin d’être accomplie. Il lui faudra longtemps encore lutter contre des difficultés de plus d’un genre. Elle veut l’instruction gratuite et obligatoire, et elle a raison ; mais les communes

  1. Les sommes portées au budget sont :
    Pour les universités et musées 12,999,080 livres.
    Pour les administrations centrales et provinciales 1,071,500 livres.
    Pour l’instruction secondaire 6,069,567 livres.
    Pour l’instruction primaire 3,569,997 livres.

    Ce sont les communes et les départemens qui contribuent au surplus de ce qui se dépense ou Italie pour l’instruction publique, 50 millions environ.