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Et cet imbécile fut trop heureux de la permission qui lui était rendue.

La première nuit, Stéphane fondit les balles ; la seconde nuit, il y tailla une croix ; la troisième nuit, il les mit tremper dans l’eau bénite, les en retira pendant la messe, puis chargea son fusil. — Maintenant, dit-il, Dobosch peut venir.

Voici comment les choses se sont passées. Je les ai vues de mes yeux. Sur la verte montagne, Dobosch nous appelant : — Amis, dit-il, mettez vos habits de fête, car aujourd’hui nous allons chez Dzvinka lui demander à souper. — Lorsque nous arrivâmes vers le soir, Dzvinka avait fermé la porte à clé, Stéphane était à son poste, debout sous le toit, le fusil à la main. Au-dessus de la maison tournoyait un aigle.

— Vois cet aigle, chef, dit un ancien, mauvais présage ! Retourne-t’en.

Dobosch cependant frappait à la porte : — Dors-tu, cousin, ou nous prépares-tu à souper ?

— Le souper n’est pas prêt, répondit Dzvinka au dedans, car Stéphane n’est pas chez lui, mais bientôt quelque chose vous sera servi qui étonnera tout le monde.

— Fais-nous donc entrer !

— Non.

— Veux-tu que nous entrions de force ? demanda Dobosch riant à moitié.

Elle riait aussi ; — Quelle impatience ! Il faudrait rassembler ses forces pendant sept ans pour connaître et pour rompre mes serrures de fer !

En haut Stéphane le visait.

Dobosch fait voler les serrures de la première porte et ouvre la seconde.

— Retire-toi ! lui crie Dzvinka de sa voix claire, retire-toi.

— Pourquoi me fuir ? demande Dobosch, la voyant reculer, pâle d’horreur.

— Tu es mort ! retire-toi ! répète Dzvinka.

Au même instant, Stéphane fit feu.

Le coup frappe Dobosch comme la foudre. Il tombe sur la face, et de sa poitrine jaillit un jet de sang. Les camarades accourent, le relèvent, mais il ne peut parler, il fait seulement signe de la main, on le porte dehors, on l’étend sur le gazon. La Dzvinka se jette sur lui en pleurant et se tordant les mains. Alors la voix revient à Dobosch. Il arrête les camarades qui veulent brûler la maison et ceux qu’elle renferme : — Qu’on ne touche à personne, dit-il, je le défends. — Puis, contemplant sa maîtresse, qui sanglote dans