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hoogheid. Son fils, Guillaume II, fut revêtu de toutes ses charges à l’âge de vingt et un ans. « Ce jeune homme, dit Raynal dans sa piquante, mais superficielle Histoire du stathoudérat, réunissait tout ce qu’il fallait pour perpétuer la gloire de sa maison, des traits agréables et majestueux, un corps robuste, adroit et infatigable, des manières aisées, séduisantes et populaires, des connaissances qui s’étendaient aux langues, à la poésie, à l’histoire, aux mathématiques, une expérience que le génie et la réflexion avaient plus étendue que les années. » Guillaume II mourut jeune après avoir tenté en vain de s’opposer à la réduction de l’armée. A sa mort, survenue en 1650, les provinces occidentales ne renommèrent point de stathouder jusqu’en 1672, quand le peuple, voyant Louis XIV aux portes d’Amsterdam, acclama Guillaume III après avoir massacré les frères de Witt. La fonction fut même déclarée héréditaire, mais, Guillaume III étant mort sans enfant sur le trône d’Angleterre, la place demeura de nouveau vacante jusqu’en 1747. Le péril de l’état souleva le peuple comme en 1672, et ce fut lui qui imposa la nomination de Guillaume IV, élu successivement stathouder dans les sept provinces. La charge fut de nouveau déclarée héréditaire, et cette fois même dans la ligne féminine. Son fils, Guillaume V, fut le premier stathouder-né et le dernier prince qui porta ce titre.

Le stathouder n’avait aucune des prérogatives qui appartiennent même aux souverains constitutionnels dont les pouvoirs sont les plus limités; il n’exerçait aucune part du pouvoir législatif et presque aucune du pouvoir exécutif; si les princes d’Orange ont commandé l’armée et la flotte, et encore sous de nombreuses réserves, c’est seulement à titre de général et d’amiral. Les services rendus par ces princes éminens ont fait toute leur puissance. La fonction qu’ils occupaient n’était pas un rouage essentiel de l’organisation politique, car, pendant qu’elle n’a pas été remplie, l’administration marchait à l’ordinaire. L’institution du stathoudérat s’explique par l’histoire des Pays-Bas, où elle a pris naissance; pour la transplanter ailleurs, il faudrait une famille illustre aimée par tous et qui en même temps se contentât de pouvoirs beaucoup moindres que ceux d’un président de république, ayant tout le prestige de la royauté sans aucune de ses prérogatives. La souveraineté était en réalité exercée par les états provinciaux, et là même elle était limitée et contre-balancée. Les souverains de la maison de Bourgogne, puis Charles-Quint et Philippe II, s’étaient efforcés d’établir peu à peu un état unitaire; mais, après que l’émancipation fut proclamée, chaque province se retrouva un état indépendant. Durant la guerre, la Hollande et la Zélande commencèrent à exercer tous les droits de la souveraineté, et les autres provinces en firent autant. Elles ne cédèrent au pouvoir central par l’union d’Utrecht que les prérogatives