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commandant en chef, qui était désigné par les états-généraux; il ordonnait les déplacemens des troupes, il veillait à l’entretien des places fortes, et enfin exerçait la haute justice militaire. En matière de finances, il dressait tous les ans au mois de décembre le budget anticipatif, generale petitie, pour l’année suivante, et le soumettait aux états-généraux et aux états provinciaux, qui devaient également voter les impôts. Il faisait opérer la rentrée des subsides consentis par les provinces, négociait pour en obtenir le paiement exact; en cas de non-paiement, il avait le droit de recourir à des voies d’exécution, c’est-à-dire de saisir des otages et de mettre des troupes en quartier dans les districts récalcitrans.

On n’eut jamais recours à ces rigueurs. Comme le conseil le déclara en 1662, certaines provinces étaient tellement en retard pour le paiement des subsides, qu’on les aurait complètement ruinées, si on avait exigé rigoureusement les arriérés. Enfin, fonction très digne d’attention, le conseil d’état était chargé de régler ou d’aplanir tous les différends qui pouvaient s’élever entre les provinces. En ce point, il faisait l’office de la cour suprême des États-Unis, dont Tocqueville a si bien fait ressortir l’importance. Les membres du conseil n’étaient point tenus, comme ceux des états-généraux, de suivre les instructions des provinces qui les déléguaient, au contraire ils faisaient serment de ne jamais sacrifier l’intérêt de la généralité à l’intérêt provincial. — MM. de La Bassecour-Caan et Van-Slingelandt nous apprennent qu’en cette qualité de haut-tribunal d’arbitrage le conseil d’état a rendu fréquemment de grands services.

Les affaires, au lieu d’être administrées comme maintenant par des ministres responsables, l’étaient alors par des collèges. La responsabilité était moindre, mais l’esprit de secte et de tradition était plus grand. Aujourd’hui encore en Angleterre ce qui concerne la marine royale est géré par le conseil de l’amirauté. En France, le régent avait fait l’essai de ce système en nommant des conseils qui correspondaient aux différens ministères. C’est ce que l’abbé de Saint-Pierre appelle la polysynodie dans l’écrit résumé par Jean-Jacques Rousseau. — En Hollande, chose plus extraordinaire, il y avait cinq collèges de l’amirauté, admiraliteits collegien, jusqu’à un certain point indépendans les uns des autres. Ils siégeaient à Amsterdam, Rotterdam, Hoorn, Middelbourg et Dokkum. Chaque collège était composé de 7 membres nommés par les états-généraux. Ces collèges, d’abord soumis à l’autorité du conseil d’état, en avaient été soustraits pour échapper à l’ingérence des conseillers anglais. En 1589, on institua un collège supérieur pour introduire plus d’unité dans l’administration de la marine ; mais l’opposition des autres provinces contre la suprématie de la Hollande obligea de le supprimer déjà en 1593. Le seul lien qui existait donc entre