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minima et à index de Six et Bunten, modifiés par MM. Miller et Casella. Des expériences préparatoires dans lesquelles ils les ont essayés à Londres sous des pressions allant jusqu’à 460 atmo- sphères[1] sont une garantie de celles qui ont été répétées en pleine mer. Sans entrer dans des détails techniques qui ne seraient intelligibles que pour des physiciens, nous dirons néanmoins que ces instrumens prêtent à la critique : 1° parce que le moindre choc peut déplacer l’index ou curseur qui indique la température la plus basse à laquelle l’instrument a été soumis; cet index est en outre sujet à se noyer dans la colonne mercurielle qui le déplace; 2° parce que la cuvette seule, et non l’instrument tout entier, est garantie de la pression[2]; 3° les liquides de nature diverse, eau, créosote et mercure, qui remplissent la cuvette et le tube thermométrique, se dilatent inégalement, et l’emploi d’un seul liquide est toujours préférable. Les thermomètres à déversement de M. Walferdin, garantis de la pression par un tube de cristal dans lequel on a fait le vide avant de le sceller à la lampe à alcool, nous paraissent supérieurs. Nous les avons expérimentés en 1838 et 1839 pendant les deux voyages de la Recherche au Spitzberg. Dans les mers chaudes ou tempérées, ils ont, il est vrai, un inconvénient qui n’existe pas dans la Mer-Glaciale, c’est la nécessité d’être ramenés à la température de zéro par un séjour d’une heure dans la glace fondante avant d’être plongés dans la mer. Du reste les résultats obtenus par les navigateurs anglais confirment ceux que nous avions constatés alors, et permettent de conclure, d’après l’ensemble de toutes les sondes thermométriques dignes de confiance, que dans le nord de l’Atlantique, de l’équateur au pôle, la température va toujours en diminuant depuis la surface jusqu’au fond. Pour en donner un exemple, nous citerons la sonde faite par le Challenger le 18 février 1873 près des Canaries. A la surface, la température de la mer était de 19° 5 centigrades et allait en diminuant assez régulièrement jusqu’au fond, où elle n’était plus que de 2°, 6. Comme terme de comparaison, nous mentionnerons la sonde que nous avons faite le 29 juillet 1839 entre le Spitzberg et la Laponie, par 73° 36’ de latitude et 18° 32’ de longitude orientale. A la surface, l’eau de la mer était à 5°, 7; au fond, à 870 mètres, elle n’était plus que de 0°,10 d’après les indications concordantes de quatre thermomètres descendus simultanément au fond de l’Océan[3]. Au milieu du canal

  1. Wyville Thomson, the Depths of the Sea, p. 296.
  2. Aussi deux de ces instrumens n’ont-ils pas pu résister à la pression de 709 atmosphères dans une sonde faite au nord de l’île Saint-Thomas; ils sont revenus à la surface brisés en plusieurs morceaux.
  3. Voyez Ch. Martins, Mémoire sur les températures de la Mer-Glaciale. — Annales de chimie et physique, 3e série, t. XXIV, p. 220, 1848, et t. XXV, p. 172, 1849.