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contemporaine : l’Angleterre en tête, la Belgique tout à côté, celle-ci rachetant par le bon marché relatif de ses produits les avantages que donnent à sa puissante voisine la possession de vastes colonies, l’opulence de son aristocratie, et l’énorme prépondérance scientifique d’établissemens publics tels que les jardins royaux de Kew ou d’associations puissantes telles que la Société royale d’horticulture de Chiswick. Il serait très délicat d’établir à cet égard une comparaison quelconque entre la France, l’Allemagne, la Hollande, l’Autriche, l’Italie et la Russie : la question est complexe, comprenant un côté commercial et pratique en dehors du côté scientifique ou esthétique, le climat lui-même et les habitudes sociales expliquant la prépondérance de telle culture sur une autre, et rendant presque impossible tout parallèle qui ne pénétrerait pas dans les détails du sujet. Un fait général domine heureusement ces diversités, c’est l’immense progrès accompli dans l’Europe entière pour tous les genres de culture dans le cours de notre siècle, et surtout à partir de la fin des guerres de l’empire.

La dernière moitié du XVIIIe siècle et le commencement du XIXe avaient vu l’introduction de plantes intéressantes des États-Unis, de la Chine, du Japon, du cap de Bonne-Espérance et de l’Australie : les serres chaudes de Schœnbrunn, à Vienne, étaient alors sans rivales ; les jardins de Kew, l’ancien jardin du roi, les jardins de la Malmaison et de Gels en France, ceux de Herrenhausen en Hanovre, d’Amsterdam et de Leyde en Hollande, de Joseph Parmentier à Enghien en Belgique, donnent l’idée du fonds des collections de l’époque entre 1780 et 1820. Les acquisitions nouvelles se faisaient surtout par les voyageurs officiels et les grands établissemens publics. La vente des plantes était restreinte : la clientèle manquait au commerce. En Belgique par exemple, une modeste société d’agriculture et de botanique, fondée à Gand en 1808, inaugura sa première exposition florale par 50 plantes étalées sur les tables d’un cabaret ! Que l’on compare ce lot aux 30,000 plantes de l’exposition de Bruxelles en 1864, on aura l’idée du progrès accompli en un demi-siècle. C’est à partir de 1830 que le mouvement s’accentue et s’accélère ; le perfectionnement des serres chaudes et des moyens de multiplication des plantes, la facilité des transports, qui permet la vente à grande distance, le bien-être et la richesse rendant possibles les dépenses de luxe, les voyages spéciaux des collectionneurs au service de grands établissemens de commerce, l’imitation des squares anglais dans les grandes villes de l’Europe, la culture en grand des orchidées et des fougères, le goût croissant pour les conifères, la naturalisation en plein air des plantes d’orangerie dans les zones privilégiées des côtes de la Provence, de la