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L’APHASIE
ET
LA FACULTÉ DU LANGAGE ARTICULÉ

I. Trousseau, Leçons de clinique médicale, 1871. — II. Onimus, Du Langage, 1873. — III. P. Broca, Bulletins de la Société anatomique, 1861.

La faculté du langage a de tout temps excité l’intérêt des philosophes : Aristote, Locke, Leibniz, Condillac, en ont fait le sujet de leurs méditations. Par l’analyse psychologique, ces grands esprits sont arrivés à des théories ingénieuses et profondes qui ont élucidé beaucoup de points obscurs. Cependant on a pu, après eux, émettre d’autres théories qui paraissent plus conformes à la vérité. C’est qu’en effet l’étude du langage a été singulièrement facilitée par la connaissance d’une maladie étrange, l’aphasie, qui, privant subitement un individu de la faculté de parler, nous permet d’observer l’intelligence d’un homme qui ne peut plus prononcer un seul mot, et nous offre en quelque sorte une expérience toute faite. Ainsi la psychologie peut trouver dans l’examen des phénomènes naturels un avantage considérable. D’ailleurs une des tendances de la philosophie moderne est de prendre pour point d’appui les faits de la science positive. Nous chercherons à montrer dans cette étude comment la physiologie pathologique peut éclairer la question délicate et ardue des rapports qui existent entre le langage et la pensée d’une part, et de l’autre entre le langage et le cerveau, organe de l’intelligence.


I.

Les premiers auteurs qui ont considéré la privation de la faculté du langage comme une maladie véritable furent les deux Frank,