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Le ministère libéral, dont les efforts se voyaient enfin récompensés par le succès, devait naturellement profiter de cette issue d’une campagne qu’il avait poursuivie en dépit des prédictions décourageantes et du blâme acerbe de ses adversaires. En effet, après avoir en quelque sorte brûlé sa dernière cartouche dans une discussion parlementaire, en face des documens communiqués à la chambre au grand complet, l’opposition conservatrice ne put ou n’osa présenter un ordre du jour qui formulât un blâme quelconque[1]. La nation néerlandaise a pu se livrer sans arrière-pensée aux réjouissances dont le vingt-cinquième anniversaire du couronnement du roi Guillaume III a été l’occasion. Ce règne, si pacifique à l’intérieur, mais non sans dignité et sans fermeté au dehors, marqué par un progrès constant et des réformes nombreuses, comptera parmi les époques les plus prospères de l’histoire des Pays-Bas. Le souverain, en s’adressant à son peuple, a pu lui dire avec une légitime fierté qu’il avait juré de défendre ses droits et ses libertés, et qu’il avait conscience d’avoir tenu sa parole. Il peut se féliciter aussi d’avoir vu sous son règne grandir encore cet empire colonial qui fait de la petite Néerlande une grande puissance orientale. Si le changement des circonstances ne permet plus à ce pays de jouer le rôle imposant qu’il put remplir en Europe aux XVIe et XVIIe siècles, il y a pour lui une compensation dans le poste honorable qu’il occupe à l’avant-garde de la civilisation dans l’extrême Orient. Au prix de grands sacrifices, il est parvenu à supprimer l’un des principaux foyers de barbarie qui existaient encore dans le monde moderne. Le commerce du monde entier profitera de sa victoire, et les petits pays ont un double mérite quand ils font de grandes choses.


ALBERT REVILLE.

  1. La crise ministérielle qui s’est déclarée tout récemment n’a rien à faire avec la guerre d’Atchin, et a pour cause une question de politique intérieure.