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achevé, des délégués étaient élus pour porter le cahier à l’assemblée générale.


III

Arrivons donc à cette assemblée générale, tenue au chef-lieu du bailliage royal et vers laquelle tout convergeait ; c’est là en effet que vont s’accomplir, à proprement parler, les élections. L’assemblée qui s’y réunit ne se bornera pas à choisir un électeur, elle nommera de véritables députés, ceux-là mêmes qui iront quelques jours plus tard siéger aux états-généraux pour y représenter le bailliage. C’est là également que nous allons retrouver pour la première fois le clergé et la noblesse.

Au jour indiqué, les trois ordres se réunissaient dans la plus grande salle du palais de justice, ordinairement appelé le palais royal, sous la présidence du bailli, qui conservait précieusement ce droit comme le dernier vestige de ses attributions passées. La séance s’ouvrait par la lecture des lettres du roi et une harangue du président sur l’objet même de la convocation. Aussitôt le discours achevé, les trois ordres se séparaient, le clergé se rendait au palais épiscopal, la noblesse chez le bailli, et le tiers-état à l’hôtel de ville.

Suivons d’abord les membres du clergé et entrons à leur suite chez l’évêque. Lorsque le chef-lieu du bailliage ne possédait point un siège épiscopal, les ecclésiastiques choisissaient un président et se rendaient dans une église ou dans une salle de quelque couvent. La séance commençait par un appel de tous les ecclésiastiques du bailliage, les bénéficiera comparaissaient en personne ; non-seulement les doyens ruraux, mais tous les curés de paroisses avaient voix délibérative. Quant aux chapitres et au clergé régulier, ils se faisaient représenter par des délégués, le plus souvent par le doyen, le supérieur ou quelque dignitaire, qui avaient été choisis peu de jours auparavant dans une réunion préparatoire. Aussitôt après l’appel, on procédait à l’élection des rédacteurs du cahier. Dès que la commission était constituée, l’évêque priait les membres du clergé de remettre entre ses mains, dans un délai assez court, tous les vœux qui devaient être compris dans le cahier de doléances, puis l’assemblée choisissait, à la pluralité des voix, ceux qui devraient porter le cahier aux états-généraux. Le clergé abandonnait ainsi la rédaction définitive à l’évêque, assisté des commissaires.

Pendant que cette séance avait lieu à l’évêché, les nobles s’étaient retirés dans la maison du bailli et délibéraient sous sa présidence ; tous les possesseurs de fiefs et de biens nobles y étaient convoqués ;