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terme : le principe de l’élection est devenu général. Tandis qu’une partie de la France possède des états particuliers, les provinces qui en sont privées ont vu les électeurs se grouper autour du bailli. Il en est résulté deux formes d’assemblées électorales d’inégale importance, mais fondées sur un même principe, — les états provinciaux et les états de bailliage, — les unes et les autres composées des trois ordres, préparant leurs doléances et choisissant librement leurs députés.

En 1483, c’est aux baillis que parviennent les lettres royales : « Nous voulons, disait le roi dans ce document adressé aux gens d’église, nobles et bourgeois, et vous mandons que, en toute diligence, vous vous assemblez et eslissez trois personnages notables de nostre seneschaussée et non plus : c’est assavoir ung d’église, ung noble et ung de l’estat commun[1]. » Les ordres du roi furent exécutés, et les électeurs se réunirent tous ensemble pour le choix des députés. Presque sous les yeux de la cour, qui était alors à Blois, eurent lieu les élections de Tours ; les représentans des principales villes et abbayes se réunirent avec quelques seigneurs au chef-lieu du bailliage, dans la ville de Tours, et choisirent en commun l’abbé de Marmoutiers, le seigneur de Maillé et Jehan Briçonnet. Les élections d’Amiens s’accomplirent dans les mêmes conditions. Le rapport de Jehan de Sainct-Delys à l’échevinage en témoigne formellement. À Rouen, le clergé consentit à se rendre à l’hôtel de ville pour procéder à l’élection ; enfin à Lyon, le député du troisième ordre fut nommé dans une assemblée des trois états. Plus les choix par les électeurs se multipliaient, plus devenaient rares les appels directs du roi. Si quelque prélat d’un rang supérieur, si les cardinaux de Lyon et de Tours sont mandés aux états de 1484, les autres évêques n’y assistaient pas comme investis du caractère épiscopal, mais comme députés d’un bailliage. La question elle-même se souleva : les évêques présens à Tours avaient voulu prendre part aux travaux de l’assemblée. Leur requête avait provoqué les plus graves objections. « La forme des élections, dit Masselin dans son journal des états, réfute d’avance leur prétention. Au commandement du roi, le clergé, la noblesse et le tiers-état sont convoqués dans leurs bailliages et sénéchaussées. S’il plaît à nos seigneurs les évêques, ils sont libres de s’y rendre, et s’ils désirent être élus, ils ne manquent pas de l’être. Tous les membres du clergé, évêques ou clercs, qui siègent ici sont censés tenir leurs pouvoirs de ceux qui les ont choisis et délégués. On prétend que l’usage établi permet à tous les

  1. Lettres du 14 octobre 1483, extraites des archives de Bayonne. M. Viollet a publié sur ces élections des documens précieux. Voyez la Bibliothèque de l’École des Chartes, 1865.