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tempêtes. Il a pour lutter avec le soleil des procédés dont le temps accusera peut-être l’imprudence, mais qui du moins jusqu’à présent laissent voir de quelle habileté le praticien aidait l’imagination de l’artiste. Seize toiles à l’exposition d’Alsace portent la signature de Decamps. Quelques-unes, comme la Rébecca, le Corps de garde turc, au duc d’Aumale, le Joseph, à la princesse de Sagan, et l’Intérieur d’une cour en Italie, jouissent déjà de cette célébrité qui ne s’attache qu’aux œuvres exceptionnelles.

C’est trop peu d’un seul tableau pour rappeler le souvenir d’un peintre tel que Marilhat, la Caravane n’est pas même un de ses meilleurs ni de ses plus importans ouvrages. A côté des Chasseurs au faucon de M. Fromentin, lancés au galop de leurs jolies cavales dans une atmosphère si transparente et si légère, les pauvres pèlerins de La Mecque semblent traîner leurs lourdes ombres sur le sable pesant du désert. Marilhat reste encore caché dans les cabinets jaloux de ses admirateurs, et le Louvre ne possède pas même une esquisse de ce premier des peintres orientalistes.

Nous terminerons cette énumération déjà trop longue des peintures exposées au Palais-Bourbon en regrettant, de citer seulement le Tintoret peignant sa fille morte, de M. Cogniet, le Duel de Pierrot, par Gérôme, les trois tableaux de C. Troyon, et, malgré l’ombre où elle se cache trop modestement, la Léda de M. Baudry.


IV

Il y a peu de dessins dans cette exposition si variée, mais quelques-uns méritent l’attention. Nous n’arrêterons pas longtemps le lecteur devant la description des fragmens empruntés aux cartons de Raphaël ; l’authenticité en est contestable, et ils n’éveillent dans l’esprit qu’un souvenir affaibli des célèbres compositions qu’on admire au Kensington-Museum. Au reste, le maître lui-même prit peu de part à l’exécution matérielle de ces vastes détrempes ; il se contenta de les faire exécuter par ses élèves, et il les livra aux ouvriers tisseurs de Flandre après avoir seulement accentué çà et là d’un trait plus vif le contour des draperies et la physionomie des têtes. Nous hésitons également à reconnaître le coup de plume du Sanzio dans la Sainte Cécile appartenant à M. Dutuit. Le rapprochement de la gravure de Marc-Antoine ne suffit pas à nous convaincre. Quoique les plus honorables estampilles couvrent le bas de cette feuille gracieuse, un œil exercé la tiendra cependant pour douteuse. Ce croquis a traversé bien des collections célèbres, mais jamais dans les ventes, il n’atteignit ce qu’on pourrait appeler des prix de confiance. Les érudits. croient reconnaître ici le lavis