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de parallélisme et de rétablir par une sorte de fiction l’équilibre des lignes. C’est ce que Baltard a travaillé et jusqu’à un certain point réussi à faire en ouvrant sur chacun des côtés de la nef une série de chapelles en fausse équerre, dont les dimensions vont grandissant à partir de l’entrée de l’église jusqu’au chœur. Sans doute cette nef, avec son plafond surbaissé, n’a pas toute la majesté digne du lieu, sans doute encore l’emploi apparent de la fonte dans un pareil monument est loin d’être aussi opportun, aussi heureux qu’il l’avait été dans la construction des Halles. Ce n’est pas sans une surprise mêlée de regret que l’œil voit se dresser le long des murs latéraux cette succession d’étroits piliers en métal supportant des statues d’anges coulées dans le même moule et dont on a vainement, au moyen de l’enluminure, essayé de vivifier l’inerte uniformité. Il serait difficile aussi de passer condamnation sur le réseau également métallique qui, en adhérant aux parois inférieures de la coupole, semble encager les lignes architectoniques et en arrêter l’élan là où il importait surtout de l’accentuer, de le stimuler pour ainsi dire par une extrême sobriété dans les formes accessoires; mais, ces points et quelques autres étant réservés, il n’y a que justice à louer les belles proportions de cette coupole et des grands arcs au-dessus desquels elle s’élève, l’effet imposant que produit le maître-autel à la place où il est érigé, enfin l’ordonnance conforme à la fois aux traditions religieuses et à la logique pittoresque, qui fait du sanctuaire un point de mire pour les regards de quiconque entre dans l’église, et un centre principal pour les adorations des fidèles. Certes l’église de Saint-Augustin n’est pas une œuvre irréprochable. Dans les mauvaises conditions qu’imposait ici la configuration du terrain, la périlleuse gageure acceptée par Baltard n’a pas été si bien gagnée qu’il n’y ait plus aujourd’hui qu’à en admirer les résultats. Il s’en faut de beaucoup toutefois que cette gageure ait été perdue, et, si celui qui s’est risqué à la soutenir n’a pas toujours trouvé dans son imagination des ressources à la hauteur de son courage, il a bien souvent lutté avec succès contre des difficultés que nul autre peut-être n’aurait même eu la pensée d’aborder.

L’église de Saint-Augustin est un des derniers travaux de Baltard, j’entends des travaux dont la responsabilité lui revient tout entière. Ceux qu’il eut à surveiller comme directeur des différentes entreprises d’architecture, de peinture, de sculpture ou de gravure, ordonnées par la ville, — depuis que son ancien titre et ses fonctions d’inspecteur des églises avaient été échangés contre un titre et un office bien autrement importans, — les soins de chaque jour qu’exigeaient de lui soit les mille détails administratifs du service dont il était le chef, soit les œuvres d’art projetées ou mises en train, — les conseils souvent délicats à donner aux artistes et aux commissions,