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porte sur l’épaule le cartouche d’un de ces rois pasteurs, Apapi (Apophis). Il résulte encore des fouilles de Sân que l’invasion et la domination des Hycsos furent moins terribles qu’on ne l’a cru, puisque, dans leur capitale même, ils ont laissé subsister les images des anciens rois nationaux, comme Amenemha Ier, fondateur de la XIIe dynastie, Osortasen Ier et Sévekhotep III (XIIIe dynastie), dont les colosses ont été trouvés debout. Si Tanis a été le centre de la domination des pasteurs pendant les cinq siècles qu’elle a duré, nous savons aujourd’hui que cette domination ne s’est jamais étendue jusqu’à Thèbes.

Les résultats des fouilles pratiquées à Sais, à Thmuis, à Cynopolis, à Bubastis, à Athribis, à Héliopolis, sont loin d’avoir la même importance. Nous avons hâte de retourner aux environs de Memphis et des pyramides, où les explorations ont été, pour ainsi dire, incessantes, et qui ont, à chaque campagne, apporté un contingent aussi riche que varié au musée du vice-roi. Un des premiers monumens trouvés aux pyramides de Giseh fut le sarcophage d’un certain Choufou-Anch, contemporain et portant le nom du fondateur de la grande pyramide. Choufou est le Chéops d’Hérodote, si mal placé par l’historien grec après Sésostris, quoiqu’il lui soit antérieur de dix-huit siècles environ. Le précieux sarcophage de Choufou-Anch représente, sur sa face principale, la décoration réduite d’un temple de cette époque reculée ; nous n’avons aucun édifice remontant à l’ancien empire, et l’on se persuade facilement que le système d’architecture dont ce monument nous offre le spécimen décoratif devait frapper l’esprit par son ordonnance harmonieuse et sobre, et par une heureuse alliance de grandeur et de simplicité.

Les différens quartiers de la nécropole de Memphis ont fourni de nouvelles tombes des six premières dynasties, qui viennent s’ajouter à celles que M. Lepsius avait publiées. Ces sépultures, offrant souvent des représentations très variées, sculptées en creux et peintes de riches couleurs, ont été étudiées avec soin par Mariette-Bey. Le mémoire qu’il a publié sur ces mastaba (tombes) prouve que, si les arts du dessin sous l’ancien empire étaient tout autres qu’aux époques plus récentes, c’est qu’ils servaient sans doute d’autres besoins, étaient l’expression d’autres idées et témoignaient de mœurs différentes. Les tombes de Saqqarah s’éloignent autant, quant à leur disposition générale, des sépultures du moyen et du nouvel empire à Thèbes que l’ornementation et les tableaux intérieurs des unes et des autres répondent à des préoccupations opposées. Rien de plus imprévu que les scènes représentées dans ces tombes de l’ancien empire pour ceux qui, n’ayant de l’Egypte qu’une connaissance superficielle, attribuent a priori à cette civilisation des bords du Nil une monotone uniformité. Les découvertes archéologiques