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d’une irrévocable résolution. « Nous ne souffrirons pas, firent-ils savoir aux députés rassemblés en ce moment à Égine, que les Grecs fassent aucune expédition, aucune course, aucun blocus hors des limites tracées de Volo à Lépante. Nous regarderons comme nulles toutes patentes délivrées à des corsaires qui seraient trouvés opérant dans d’autres parages. Les bâtimens de guerre des puissances alliées auront partout l’ordre de les arrêter. Il ne vous reste aucun prétexte pour tolérer de pareils armemens. L’armistice de mer se trouve établi de fait du côté des Turcs ; leur flotte n’existe plus. Prenez garde à la vôtre, car nous la détruirons, s’il le faut, comme nous avons détruit la flotte d’Ibrahim. Quant au tribunal des prises que vous avez institué, nous le déclarons dès aujourd’hui incompétent pour juger aucun de nos bâtimens sans notre concours. »

Ces menaces ne devaient pas rester lettre morte ; elles furent au contraire, grâce au zèle et à l’activité de nos croiseurs, suivies de prompts effets. La station française avait reçu d’importans renforts : les frégates l’Iphigénie, la Vestale, le vaisseau le Conquérant, sur lequel l’amiral de Rigny venait de porter son pavillon. Il nous était désormais facile d’appuyer nos paroles par des actes. Dès les premiers jours de novembre 1827, toute la flottille française fut en chasse ; elle ne prit de repos que vers la fin de l’année 1828. Les corvettes la Pomone, la Bayadère, la Victorieuse, l’Écho, la Diligente, les bricks le Palinure, l’Alacrity, l’Actéon, le Zèbre, le Marsouin, le Loiret, les bricks-goëlettes le Volage, l’Alcyone, la Flèche, les gabares la Lionne, la Lamproie, les goélettes la Daphné, l’Estafette, appuyèrent une si vigoureuse poursuite aux pirates qu’en moins de dix-huit mois ils en eurent complétement purgé l’Archipel. Ce fut à cette tâche méritoire que se consacrèrent sans relâche les Reverseaux, les Parseval, les La Susse, les Châteauville, les Moulac ; ils firent renaître la sécurité là où avait régné trop longtemps, grâce à notre mansuétude excessive, la plus incroyable terreur. Entre tous ces croiseurs, il faut déjà citer un de nos futurs ministres de la marine, le lieutenant de vaisseau Hamelin. « Je le place, écrivait l’amiral de Rigny, à la tête des meilleurs officiers de son grade. » Au moment où le vainqueur de Navarin lui décernait cet éloge, le capitaine de la Lamproie venait de prendre sur les côtes de Syrie le brick grec le Panayoti, monté par 66 hommes d’équipage. Conduit à Alexandrie, ce bâtiment-pirate fut reconnu par les capitaines de plusieurs navires marchands qu’il avait pillés, les uns à Scarpanto, d’autres sur la côte de Caramanie, Le commandant de la frégate la Magicienne, M. Cornette de Venancourt, s’apprêtait alors à quitter les eaux de l’Égypte pour retourner à Smyrne. Le capitaine Hamelin lui remit le corsaire capturé. L’équipage grec