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profite de la présence des ouvriers et des chevaux que l’organisation des entrepôts fictifs permet de maintenir à Paris. Un très intéressant calcul a été fait à cet égard. En divisant le total de la population de Paris par le produit de l’octroi, on voit que chaque habitant paie dans l’espace d’une année la somme de 57 fr. 29 centimes. Or les 1 313 usiniers entrepositaires occupent actuellement 64 003 employés, ouvriers ou gens de peine ; c’est donc un groupe de 65 316 individus qu’il faut nourrir, et qui par ce fait acquittent chaque jour les taxes des denrées alimentaires. Ce calcul est encore bien au-dessous de la réalité : en effet, la moyenne de la famille bourgeoise à Paris est de quatre personnes, celle de la famille ouvrière est de trois ; en tenant compte de cette proportion, nous arrivons au chiffre de 197 261, dont l’apport direct à l’octroi est de 11 301 082 fr., auxquels il convient d’ajouter 207 636 fr. représentant les taxes afférentes à la nourriture de 2 895 chevaux qui font le service dans ces usines ; c’est donc 11 millions 1/2 que les entrepôts fictifs versent indirectement à l’octroi.

Toutes les opérations que j’ai rapidement énumérées forment un total considérable, car en 1872 l’octroi a manipulé 5 962 927 articles qui ont chacun exigé un acte du contrôle et un acte de la recette ; la perception définitive a été de 150 939 848 francs, dont 50 503 155 francs pour le trésor : le reste a servi aux besoins de la ville. L’octroi rapporte d’autant plus que la prospérité de la cité est plus grande ; il n’est pas nécessaire dans ce cas de forcer les taxes et de surcharger les denrées, l’argent vient de lui-même et n’exige pas qu’on aille le chercher. Le fait seul du temps d’arrêt que subissent les améliorations de Paris est très préjudiciable à nos finances : avant qu’un locataire ait pu prendre possession d’un appartement dans une maison nouvellement construite, celle-ci a déjà rapporté 5 pour 100 de sa valeur à l’octroi (exactement 4 915 fr. 22 cent, pour une bâtisse de 100 000 fr.). Ceci est à considérer, et la ville, dans l’intérêt même de ses propres ressources, fera peut-être bien de reprendre quelques-uns des travaux interrompus depuis les premiers mois de 1870. On s’est plaint jadis que l’on en faisait trop, on se plaint aujourd’hui que l’on n’en fait plus du tout ; entre ces deux extrêmes, il semble que l’on pourrait déterminer une moyenne raisonnable.

L’épithète d’actif appliquée au personnel le plus nombreux de l’octroi est très méritée, car l’action y est incessante. On ne se doute guère de la quantité extraordinaire de voitures de toute sorte qui, passant aux barrières, nécessitent son intervention. Pour satisfaire la curiosité du lecteur, j’ai fait relever le nombre des voitures, des trains de chemin de fer, des bateaux soumis à la visite des prépo-