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agricole ; la troisième aboutit à la vallée de Jauja. L’hésitation était permise, on s’arrêta au tracé qui offrait en somme le plus d’avantages réunis, à la vallée du Rimac, qui, placée entre les deux autres, permettait à un moment donné de joindre le Cerro de Pasco et Jauja par deux lignes transversales partant de la Oroya, au faîte même de la Cordillère. Le tracé du Rimac par la Oroya était d’ailleurs le plus direct, et aussi au point de vue technique le plus avantageux pour l’établissement d’une voie ferrée. Il faut considérer en effet que, pour gagner une hauteur de près de 5 000 mètres sur un développement qui ne dépasse pas 30 lieues, il est nécessaire de faire d’assez grands détours, que par conséquent la vallée la plus large offre plus de facilités pour les travaux ; d’autre part, une pente maximum de 4 pour 100 et de courbes minimum de 150 mètres de rayon peuvent être admises pour les machines perfectionnées que l’on possède aujourd’hui, lesquelles permettent de traîner dans ces conditions un train de 100 tonnes avec une vitesse de 13 kilomètres à l’heure ; mais excéder cette limite, c’était s’exposer à des frais de traction trop considérables pour une exploitation productive. À tous ces points de vue, la vallée du Rimac était préférable ; moins large, il est vrai, que celle de San-Damian, elle présentait une pente plus régulière, évitait par conséquent le percement de trop longs tunnels, et dans la vallée de Chancay, plus étroite que les deux autres, on eût rencontré dans la partie la plus élevée, à Huactapunco, Huampon et Vichaycocha, des cascades et des pentes insurmontables.

Le système Fell, inauguré alors en Europe sur le Mont-Cenis, eût permis de parer en partie à ces inconvéniens ; il avait aussi l’avantage de coûter moins cher, de se construire plus vite, et d’admettre des pentes de 8 pour 100 avec des courbes plus fortes ; toutefois ce système était encore peu connu, les avantages n’en étaient pas encore bien démontrés, les dérangemens étaient fréquens, et les frais d’exploitation assez élevés. Au Pérou d’ailleurs, à cette époque, on regardait peu à l’argent ; la ligne centrale transandine semblait appelée à beaucoup d’avenir ; il suffit que le système ordinaire, avec une seule voie et des rails ayant 1 mètre 44 centimètres d’écart, ne fût pas jugé impraticable pour qu’il fût adopté. Il le fut en effet, et le 22 décembre 1869 M. Henry Meiggs voyait, par un double décret du colonel Balta, ses propositions acceptées pour la construction des deux premiers chemins de fer transandins de Puño et de la Oroya. Pour ce dernier, qui nous occupe seul, le gouvernement péruvien accordait 27 millions de solis (136 millions de francs), payables en bons du trésor, l’admission en franchise de tout le matériel nécessaire à la route, l’autorisation de faire venir des travailleurs de l’étranger, et l’usage gratuit des terrains appartenant à l’état que la voie devait traverser ; une semaine plus tard, en janvier 1870, eut