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vés que l’on cherchait vainement à obtenir par une législation minutieuse et routinière, c’est le perfectionnement des voies de communication et l’extension des opérations de commerce qui nous en ont enfin dotés : les voies de communication en unifiant notre marché intérieur, et les opérations de commerce en le reliant de plus en plus au marché général des subsistances. C’est ainsi que nous aurons conjuré deux des plus grands maux qui puissent nous atteindre : des prix avilis dans l’abondance, la cherté excessive dans le déficit.

Tous les faits qui sont survenus depuis quelques mois ne font qu’ajouter encore à cette démonstration. Ce qui avait empêché l’exportation de prendre une allure plus rapide à la suite de la récolte de 1872 en faisant monter le prix, seul moyen de modérer l’exportation, c’est la mauvaise apparence de la récolte suivante. Les pluies de l’hiver et du printemps avaient noyé le sol ; le blé était atteint par la rouille dès le mois d’avril dernier. On prévoyait que la récolte serait sûrement mauvaise. Cette prévision s’est réalisée, malgré toutes les assertions contraires ; mais il n’y a pas lieu d’en concevoir la moindre inquiétude. Les besoins de la consommation sont prévus, le commerce a pris ses mesures à temps. En se relevant successivement avant la récolte, les prix avaient modéré l’exportation et ranimé le courant de l’importation. En septembre, une hausse de 1 franc environ par hectolitre a eu lieu sur le prix moyen du mois précédent. Le blé a légèrement dépassé 28 francs l’hectolitre ; il est redescendu à 27 francs à la fin d’octobre pour se rapprocher de nouveau de 28 fr. au commencement de décembre ; mais tout porte à croire que la baisse est proche et qu’elle fera des progrès rapides, lorsque les apparences de la récolte prochaine, dans les divers pays d’importation et d’exportation, auront permis d’établir avec certitude les conditions de l’approvisionnement général.

On pourra trouver ces prévisions trop optimistes : elles sont cependant justifiées par les faits constatés antérieurement. Depuis la suppression de l’échelle mobile, on peut observer que nos prix les plus élevés des années de déficit ont lieu au mois de septembre. Il en a été ainsi en 1861 et en 1871. La baisse actuelle est un indice qu’il en sera de même à la suite de la récolle de 1873. L’approvisionnement est sinon fait, du moins assuré. L’état de nos ensemencemens au printemps prochain pourra seul, nous le croyons, arrêter la baisse des prix. Si la récolte future présentait alors de mauvaises apparences, les prix, au lieu de continuer à descendre, se relèveraient, et le terrain gagné pourrait être perdu de nouveau : mais cette hausse ne cesserait pas un instant d’être régulière, et nous ne pensons pas, dans tous les cas possibles, qu’elle pût jamais nous ramener des prix au-dessus de 30 francs l’hectolitre, comme nous l’avons vu si fréquemment dans le passé et jusqu’en 1868. À ce taux d’é-