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que ses collègues de province. Ses fonctions furent plus restreintes ; il n’eut pas la police dans sa dépendance. Cette police spéciale de Paris nous fournit un nouvel exemple de la substitution de l’autorité administrative à l’autorité judiciaire. L’établissement de la police parisienne se lie d’autre part au caractère nouveau que prenait le régime communal à la suite du mouvement centralisateur que le gouvernement avait imprimé à l’administration tout entière.


II

La police intérieure des villes et des bourgs qui jouissaient de leur indépendance municipale, après avoir été à peu près autonome, commençait à se subordonner à la direction du gouvernement royal. A partir du XVIe siècle, on la voit souvent réglée par des ordonnances générales. Ainsi l’ordonnance d’Orléans contient sur l’alignement, sur le mode de construction, des règles qui sont imposées à toutes les cités du royaume. Le roi allait jusqu’à statuer pour cause d’utilité publique sur des matières qui rentraient essentiellement. dans les attributions de la police urbaine. En 1577, Henri III décide qu’une autorisation royale sera requise pour tenir taverne, cabaret, hôtellerie, et cette disposition est renouvelée par Louis XIV. Les intendans exercèrent par eux et leurs subdélégués, en vertu des attributions qui leur étaient données, une surveillance sur la police intérieure des villes de leur généralité ; mais Paris se trouva forcément sous le gouvernement plus direct du roi, qui y créa des offices pour la voirie urbaine, pour le courtage, pour l’inspection des marchés, des poids et mesures, ce qu’il fit ensuite pour d’autres villes. Quant à la police judiciaire et de sûreté publique, qui appartenait dans la province aux baillis et sénéchaux et qui eut pour agens principaux les gens de la maréchaussée, les archers et les sergens, elle était naturellement exercée à Paris par le Châtelet, qui représentait à la fois le bailliage et la prévôté. A cette juridiction appartenait la police générale de la capitale, de ses faubourgs et de sa banlieue, et voilà pourquoi au XVIe siècle le, lieutenant civil et le lieutenant criminel du Châtelet faisaient concurremment la police, association qui avait l’inconvénient d’amener de fréquens conflits entre les deux magistrats.

Dans une ville telle que Paris, où les malfaiteurs ont abondé de tout temps, et où il était facile d’échapper à la justice, il fallait, pour réprimer les crimes et assurer la sécurité des habitans, autre chose que des juges chargés des affaires de leur tribunal et peu versés dans les détails de plus en plus complexes d’une administration qui embrassait presque toute l’édilité. Paris d’ailleurs, allait