Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 108.djvu/636

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et des Beni-Amran, prit la route de Palestro, distant d’environ 27 kilomètres; l’autre, la plus forte, se dirigea sur l’Alma. Après la prise prévue de Palestro, ces deux troupes devaient se réunir pour continuer ensemble leurs opérations. Les indigènes qui s’avançaient sur Palestro pillèrent et brûlèrent toutes les maisons cantonnières sur leur passage; les autres, après avoir brûlé Bellefontaine, saccagé la ferme du Corso et celles de Foës, vinrent faire le coup de feu devant l’Alma, où leur attaque se brisa contre la colonne Fourchault. Les tribus des environs de Palestro étaient en relation avec celles qui marchaient sur le col de Beni-Aïcha, et comme signal elles n’attendaient que la prise de ce petit village. Le 19, elles en furent bientôt instruites; dans la nuit, une grande réunion eut lieu à l’Arbaa des Beni-Khalfoun, et l’attaque de Palestro fut résolue pour le lendemain. Quelques heures auparavant, les principaux des Beni-Ammals et des Beni-Khalfoun étaient venus trouver M. Bassetti en protestant de leur attachement à la France; mais au matin il n’y eut plus à douter de leur perfidie. La femme d’un officier supérieur qui s’était mise en route de fort bonne heure pour le Fondouck dut rebrousser chemin, le passage était intercepté par des bandes armées. En même temps, des enfans effrayés rentraient au village avec leurs troupeaux : ils avaient vu les Arabes traverser en foule la rivière, et déjà des meules de fourrage étaient en feu aux environs. Immédiatement on battit la générale, on sonna le tocsin; en peu d’instans la défense fut organisée. Les habitans furent répartis dans trois maisons reconnues les plus propres à la résistance : le presbytère, la caserne de gendarmerie et la maison des ponts et chaussées. Elles sont isolées et forment entre elles une sorte de triangle que des feux convergens pouvaient couvrir. On y pratiqua des meurtrières, et on y porta précipitamment des provisions avec ce que les habitans avaient de plus précieux. Le capitaine Auger, officier du génie, alors en mission à Palestro, et le curé Monginot commandèrent au presbytère, le maire Bassetti et le brigadier de gendarmerie à la caserne, occupée par les gendarmes et quelques colons. La maison des ponts et chaussées, couverte d’une terrasse voûtée, ayant une cour ceinte d’une muraille, était la plus commode à défendre. On y mit les femmes, au nombre de 14, 12 enfans et quelques miliciens, sous les ordres du conducteur des ponts et chaussées nommé Ricard. Dans la cour, on réunit une grande quantité de provisions de bouche. On avait à peine eu le temps de prendre ces dispositions que le signal de l’attaque était donné par un drapeau hissé sur le bordj du caïd des Ammals.

Aussitôt les maisons les plus éloignées sont livrées au pillage; quelques malheureux Européens qui n’avaient pu fuir assez vite, assaillis par les indigènes, sont leurs premières victimes. Toute la