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UN ÉPISODE
DE L’INSURRECTION KABYLE
DE 1871

L’ALMA. — PALESTRO.


I.

Confiante dans le vote du corps législatif du 9 mars 1870, l’Algérie s’apprêtait à goûter les bienfaits, nouveaux pour elle, du régime civil, lorsque tout à coup éclata la guerre franco-allemande. La plus grande partie de l’armée d’Afrique ne tarda pas à s’embarquer pour aller combattre sur les bords du Rhin, et au mois de septembre la colonie, dégarnie de troupes, restait en présence de 2,500,000 indigènes. Il faut ignorer étrangement l’Algérie pour croire que ceux-ci aient jamais accepté la domination française sans l’espoir d’un temps meilleur, suivant la parole du prophète : « baisse la tête devant la force manifeste de tes ennemis, mais relève-la plus fière quand le triomphe de l’islam sera assuré. » Depuis le premier jour de l’entrée des Français à Alger, et quoi qu’on dise de la pacification du pays, l’indigène est toujours prêt à la révolte. Est-il battu, est-il forcé d’implorer l’aman, c’est la nécessité seule qui l’amène à faire acte de soumission, et jamais il n’abandonne l’idée de recommencer la lutte. Ce sera dans six mois, dans un an, dans deux ans, peu importe; l’espoir de nous jeter à la mer marche et dort avec lui.

Le musulman algérien vit dans l’attente de son messie, — Moul-el-Saa, le maître de l’heure, — un valeureux sultan, armé d’un glaive céleste, monté sur un coursier rapide et exterminant tous les infidèles sur son passage. « Il massacrera les mécréans jusqu’au