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le principal de la contribution des patentes avait aussi pour but d’atteindre indirectement les bénéfices commerciaux et industriels, l’assemblée reculait devant les autres propositions relatées dans le rapport de M. Casimir Perier sur le budget rectifié de 1871, c’est-à-dire la retenue sur certains traitemens et la taxe directe sur les bénéfices individuels. Ce timide essai de l’impôt sur le revenu ne nous semble pas cependant avoir répondu aux intentions de ceux qui l’ont provoqué. Déjà la surtaxe des patentes est abandonnée, le droit sur les prêts hypothécaires ne frappera jamais que les seuls emprunteurs, et tarira la source d’opérations populaires, en province surtout ; on doit enfin attribuer en partie à la taxe de 3 pour 100 sur les valeurs mobilières la préférence accordée à la rente française, exempte de toute retenue, ce qui n’est pas un mal ; mais il en résultera aussi une tendance à faire des placemens à l’étranger, ce qui dans les circonstances actuelles n’est pas un bien.

Ce n’est pas le moment de s’étendre davantage sur le mérite respectif des impôts de telle ou telle nature, sur les divers systèmes de fiscalité : en indiquant quelques-unes des conséquences d’une application qui trompe souvent les espérances ou les intentions premières du législateur, on doit faire observer, à l’éloge de l’assemblée nationale, avec quelle hésitation elle a procédé en cette matière ; il n’y a certes pas à la blâmer de revenir sur ses pas quand l’expérience l’avertit de le faire, de proposer un accroissement des impôts directs et d’y renoncer, de commencer par une taxe sur l’un des revenus mobiliers et de s’arrêter avant de frapper les autres, de chercher enfin dans des surtaxes de détail sur les impôts indirects les principales ressources dont elle augmente le budget, de faire en un mot œuvre d’administrateurs pratiques plutôt que de théoriciens. C’est en matière d’impôts surtout qu’il faut se défier de la logique. Toutefois les modifications de détail ont leur limite, les impôts indirects veulent aussi être ménagés. L’année 1872 a montré que les surtaxes ne donnaient pas toujours ce qu’elles promettaient ; le rapport de M. Gouin l’a bien prouvé : au moment où il le lisait à la chambre, les douanes avaient rapporté (en 1872) 34 millions de moins qu’on n’avait prévu, et les contributions indirectes 75. Sans doute les approvisionnemens anticipés et la fraude étaient pour beaucoup dans ce mécompte ; 1873 a rétabli la balance. Les recettes, par rapport à l’exercice précédent, ont augmenté tant sur les anciens que sur les nouveaux impôts ; pour les neuf premiers mois, il n’y a qu’un léger déficit sur les prévisions. Il faut donc se montrer satisfait des résultats acquis ; mais, alors que la somme donnée par les nouveaux impôts créés et à créer dans les trois années 1871, 1872 et 1873 doit atteindre le quart du budget total des recettes, ne serait-ce pas courir après l’impossible que de chercher une source