Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 107.djvu/784

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à l’issue du second de ces golfes. Un promontoire rocheux, usé par la vague, tout noir d’algues marines, s’offre ensuite : c’est le cap Thémistocle, massif interposé entre le Pirée et la baie que termine à l’est le cap Colias. Ce promontoire est fameux à plus d’un titre. Deux des trois ports d’Athènes, Phalère et Munychie, étaient situés sur celle de ses faces qui regarde le Levant. Ces ports sont aujourd’hui à peu près comblés ; l’accès n’en est permis qu’à des barques ou à des navires d’un très faible tirant d’eau. Le Pirée seul peut encore recevoir des frégates. La baie de Phalère, très médiocre mouillage, ouvert aux vents du sud, n’a aucun des avantages du port dont elle a gardé le nom ; au point de vue stratégique, elle n’en a pas moins son importance, car nulle partie du rivage n’est plus rapprochée d’Athènes. On compte environ quatre milles du Pirée aux murs de l’Acropole ; il n’y en a guère que deux entre l’enceinte de cette citadelle et le fond de la baie.

Une éminence arrondie, d’une élévation peu considérable, ― 87 mètres, — domine tout cet ensemble. Ce fut de là dit-on, que s’élança Thrasybule quand il vint délivrer la ville des trente tyrans. Il surprit les hauteurs de Munychie, comme le jeune Bonaparte devait surprendre, au début de sa carrière, le Petit-Gibraltar. Le colonel Gordon s’inspira en 1827 de ce double exemple ; mais avant d’oser rien tenter dans la baie de Phalère, il voulut attirer ailleurs l’attention des Turcs. Le colonel Bourbaki fut investi du soin de cette diversion. Il reçut l’ordre de se porter sur le revers oriental des montagnes qui séparent de la plaine d’Athènes la campagne et les marais d’Eleusis.

Nous retrouvons ici des lieux qui nous sont déjà connus. Ce long rameau montagneux qu’on voit se diriger du bord de la mer vers le nord, dont le pied est baigné par les eaux de la rade de Salamine, et dont la plus haute cime finit par atteindre, de degré en degré, la hauteur de 1,400 mètres, c’est la chaîne du Corydale, de l’Œgaleus, du mont de Daphné, de l’Icarus et du Parnès ; c’est le théâtre des premiers efforts tentés par Karaïskaki et par Fabvier pour secourir Athènes. Le voyageur qui débouche par le col de Daphné a devant lui, à 5 milles environ de distance, la cité de Minerve. La route qui l’y conduit à travers le grand bois d’oliviers et le lit torrentueux du Céphise, c’est l’antique voie sacrée. Plus haut que le col de Daphné, sur les premiers contre-forts du Parnès, à 10 ou 11 milles d’Athènes, s’ouvre une autre brèche par où descend vers Khasia et Kamatero la route de Thèbes. Cette brèche, le colonel Bourbaki la franchit le 3 février 1827 ; le 4, il était établi au village de Khasia avec ses 800 hommes et les 2,000 irréguliers qui reconnaissaient pour chefs Vassos et Notaras.