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et Francesco Mazzuoli n’est né qu’en 1503. Or l’on a trouvé dans les cartons du British Museum une eau-forte datée de 1496 et signée de Wenceslas d’Olmütz ; elle représente un sujet allégorique ayant trait aux différends qui, dès cette époque et vingt ans avant Luther, divisaient la cour de Rome et les princes allemands. Faute de mieux, c’est à Wenceslas d’Olmütz que l’on reporte l’honneur de la découverte ; il serait plus juste de constater simplement que la plus vieille eau-forte connue a été gravée par lui.

Bien des peintres célèbres n’ont point dédaigné de quitter quelquefois la brosse pour la pointe ; Van Everdingen, Castiglione, Salvator Rosa, Claude le Lorrain, Coypel, y excellèrent, mais l’homme qui a su en tirer les effets les plus énergiques et les plus extraordinaires, c’est Rembrandt, qui en fit une sorte d’art à part dont il a emporté le secret avec lui. Ses épreuves ont été si souvent reproduites ou contrefaites qu’elles sont certainement familières au souvenir des lecteurs.

De notre temps, on a essayé de relever la gravure à l’eau-forte, dont la lithographie avait diminué l’importance, et que la photographie menaçait de remplacer tout à fait. On a essayé de lutter contre l’insouciance du public, on a tenté de sauver une des formes de l’art où l’initiative individuelle trouve moyen de se manifester sans entraves, on n’a pas voulu qu’elle mourût, et l’on a réussi au-delà des espérances. La Société des aquafortistes existe, elle se recrute, elle prospère. Les hommes de talent qui la composent sont nombreux, et leurs œuvres ont été remarquées à nos expositions annuelles. On n’avait, jusqu’à un certain point, que l’embarras du choix ; on s’adressa aux plus habiles d’entre eux, et quatorze artistes éprouvés furent chargés de transcrire par la pointe les dessins de M. Bida, qui, entraîné lui-même et payant d’exemple, grava une de ses compositions : la Naissance d’un fils (saint Jean, XVI, 21), et signa une des planches les meilleures, les plus lumineuses des Évangiles. Tout en laissant aux aquafortistes les coudées aussi franches que possible, il était bon, pour éviter toute dissonance de se produire, de leur imprimer une direction sinon uniforme, du moins générale. Il fallait donc choisir parmi eux un homme qui eût assez de talent pour que son autorité fût acceptée sans contestation, et qui fût au fait de tous les procédés à l’aide desquels on peut donner aux gravures à la pointe les qualités qu’elles comportent. Un peintre-graveur fort connu par ses belles productions[1], M. Edmond Hédouin, fut chargé de cette tâche assez difficile ; il fut réellement directeur de la gravure de

  1. Nous citerons entre autres la gravure de la Diane au bain de Boucher, qui est à la Chalcographie du Louvre.