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quatrième de quarante, mais ces deux fois encore Diouk Stépanovitch égare ses salutations : elles sont seulement la chambrière et la panetière de sa mère, « Il regarde toujours, et voici que l’on conduit une vieille princesse, une vieille matrone ; sous le bras, droit, trente jeunes filles la soutiennent, sous le bras gauche trente autres jeunes filles. On étend autour d’elle des pièces de velours, afin que le rouge soleil ne lui brûle pas le teint. Elle est vêtue d’une robe de couleur : sur sa robe, on voit représentée la lune ; sur elle resplendit le SOleil, sur elle brillent les étoiles menues. » A consulter les estampes du XVIIe siècle, il semble que les choses se passaient quelquefois plus simplement. Derrière une procession de boïarines embéguinées, portant des vases de parfums, et des groupes de jeunes filles aux cheveux épars, qui tiennent des cierges, — s’avancent, sous un dais ou sous une ombrelle, la tsarine et ses enfans. Elle est à pied, souvent avec une canne à la main, la couronne impériale sur la tête : les tsarévnas la précèdent avec les diadèmes à fleurons sur leur longue chevelure bouclée, ainsi que le petit tsarévitch, en costume de vieux Russe, petit caftan, petites bottes, petite toque de fourrure. Il est porté sur les bras de la nourrice : c’était de règle, paraît-il, même pour un jeune prince de dix ans, comme celui qui est figuré sur nos dessins. Chez nous, Louis XIV, âgé de cinq ans, s’irritait qu’on le forçât de porter des lisières pour se rendre à la séance du parlement. L’étiquette le voulait ainsi.

La tsarine avait sa cour particulière, séparée de celle de son mari, une cour de dames. Il en fut longtemps ainsi en Occident : c’est seulement vers le XVe ou le XVIe siècle que de galans souverains, comme François Ier, s’avisèrent de trouver « qu’une cour sans dames était comme un printemps sans roses. » Auprès des épouses des tsars, il y avait d’abord les nourrices de leurs enfans, femmes de haute noblesse pour la plupart, mais dont le rang ne se déterminait plus que par l’âge et le sexe de leurs nourrissons, — puis les dignitaires du palais : l’échansonne, la trésorière, la lingère, la chambrière, la boïarine-juge, qui décidait des conflits entre les gens du palais. Une dizaine d’autres dames portaient, sans fonctions déterminées, le titre de boïarines du Verkh. A chaque avènement de tsarine, de nouvelles fournées venaient grossir l’ancienne noblesse palatine ; la souveraine régnante faisait souvent entrer dans la demeure des tsars des campagnardes en laptis, qui étaient ses sœurs ou ses cousines. Puis venaient, entre autres dames dignitaires, les institutrices des enfans princiers, les liseuses de psautier, les boïarines jeunes filles ou boïarines de vestibule, qui appartenaient toutes à la petite noblesse ou aux classes nouvelles. Si l’on ajoute les femmes de chambre, les maîtresses en lingerie, broderie, étoffes d’or et d’argent, qui travaillaient sous la surveillance directe de