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nemens où ils sont le plus nombreux, dans ceux de Kazan, d’Orenzurg et d’Astrakan, ils n’atteignent pas le tiers de la population totale. Sur le Volga même, contrairement aux préjugés courans, la majorité a passé aux chrétiens. Ainsi réduits, on voit qu’ils ne sauraient être d’un grand embarras pour la Russie, et qu’en leur accordant les mêmes libertés qu’à ses autres sujets le tsar peut leur imposer les mêmes charges.


V.

Au-dessus des Finnois et des Tatars, dont en Russie le rôle ethnologique a été fort inégal, vient la race qui a subjugué ou absorbé les autres, celle dont le nom sonne fièrement à toute oreille russe, la race slave. Sur la place et la parenté des Slaves, point de doute possible. Comme les Latins, les Celtes et les Germains, ils font partie de cette grande race aryenne à laquelle semble échue la domination du monde. De cette communauté d’origine, ils ont pour garans leur type physique, leurs langues, leurs premières traditions. Ainsi que le grec, le latin et l’allemand, les langues slaves ne sont, à vrai dire, que des dialectes de cet idiome indo-européen dont le sanscrit est le plus ancien type. Ainsi que ceux de l’Allemagne, les contes et les légendes slaves reproduisent et complètent les données d’où sont sortis les mythes de l’Inde et de la Grèce. Pas plus que nous, les Slaves ne sont asiatiques, ou, s’ils le sont, ils ne le sont pas autrement que nous. Leur établissement en Europe remonte au-delà de toute époque historique. On ne sait qui des Slaves ou des Germains ont les premiers quitté l’Asie; en tout cas, leur émigration a dû se faire à peu d’intervalle. Entre les grandes tribus aryennes qui se partagent l’Europe, il est difficile de décider du degré de parenté; quelques savans ont voulu voir un lien plus intime entre les Slaves et les Germains, mais par leurs langues les Slaves semblent à peu près aussi loin de leurs voisins de Germanie que des Hellènes et des Latins; pour le caractère, ils se rapprochent plus de ces derniers. Aryens comme nous, les Slaves, comme les Celtes, les Hellènes, les Latins et les Germains, appartiennent à la branche occidentale, à ce qu’on pourrait appeler la branche européenne des Aryens. Dès les temps les plus anciens, on les trouve établis en Europe sur la Vistule et sur le Dnieper.

A travers les obscurités de l’histoire, il est difficile de découvrir le type primitif des premières tribus slavonnes. Celtes, Germains ou Slaves, l’antiquité classique confondait tous les peuples étrangers sous le nom de barbares, les peignant des mêmes couleurs, leur attribuant des mœurs analogues, ce qui permettrait peut-être de supposer qu’au moral comme au physique ces tribus ne différaient pas