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faites pour retenir les eaux pluviales. En général, les sources sont rares, et par compensation très abondantes : l’une des plus connues est la Douix, admirable fontaine qui jaillit du rocher à Châtillon-sur-Seine. Cette région est assez pluvieuse; il y tombe, année commune, 85 centimètres d’eau. Les plateaux sont arides, et les vallées sont bien arrosées; les ruisseaux sont limpides, les crues ont peu d’importance. Le terrain crétacé inférieur, imperméable au plus haut degré, contient un très grand nombre de sources, et aussi beaucoup d’étangs, car le défaut de pente ne permet pas un rapide écoulement. Les eaux de pluie ruissellent à la surface, troublent les ruisseaux et donnent dans les rivières des crues violentes qui par bonheur n’ont qu’une courte durée. S’il n’y existait des routes bien empierrées, ce pays deviendrait tout à fait impraticable pendant la mauvaise saison. C’est donc, comme nous l’avons dit, une excellente ligne de défense militaire.

La craie blanche reçoit peu de pluie (seulement 59 centimètres année moyenne), et elle absorbe rapidement les eaux pluviales, car elle est remplie de fentes et de fissures. Cependant il est à croire qu’elle devient plus compacte à une grande profondeur, et que les eaux absorbées s’y maintiennent à un niveau variable, plus élevé au printemps qu’à l’automne, qui est l’époque des plus grandes sécheresses. Les plis de terrain qui conservent une altitude supérieure en tout temps à cette nappe souterraine ne contiennent aucune source; elles sont d’une sécheresse absolue; on ne peut s’y procurer de l’eau qu’en creusant des puits dont la profondeur atteint quelquefois 60 mètres, tandis que les vallées principales, creusées au-dessous du niveau permanent des eaux, sont arrosées par des sources abondantes qui tarissent tout au plus dans les étés très chauds. La Vanne, petite rivière de la Champagne dont la ville de Paris s’est appropriée les plus belles sources, la Vanne appartient au terrain crayeux. Plus au nord, vers Troyes, Châlons-sur-Marne et Reims, se montrent encore quelques jolies rivières issues de la craie, mais le nombre en est très restreint. Il n’est guère de provinces de la France où l’on puisse faire tant de chemin sans rencontrer de l’eau courante à la surface du sol.

Quant aux terrains tertiaires, ils présentent les apparences les plus diverses suivant leur nature. Lorsqu’ils sont imperméables, comme la Brie et le Gâtinais, ils ont des sources éphémères qui tarissent l’été, et des ruisseaux qui débordent en hiver ; cependant le terrain est si plat qu’un écoulement trop rapide des eaux n’est jamais à craindre. M. Belgrand remarque avec raison que, si le massif de la Brie avait, en conservant son caractère géologique, une altitude comparable à celle du Morvan, il en découlerait après les grandes pluies des torrens impétueux qui ravageraient la vallée de